PEULS, FULBE ou FULANIS
Origine et histoire
L'origine du noyau humain autour duquel s'est formée l'« ethnie » peule est vraisemblablement à chercher chez les « pasteurs à bovidés » du Sahara préhistorique, dont l'aspect et le genre de vie, tels qu'ils apparaissent dans les peintures rupestres du Tassili, évoquent étonnamment ceux des Peuls nomades d'aujourd'hui. Une longue période sépare les premières mentions des Peuls dans l'histoire de ces « proto-Peuls » (qui ont pu aussi être à l'origine de certains pasteurs de l'Est africain), puisque ces fresques remonteraient aux VIe-IIe millénaires avant notre ère et que les Peuls apparaissent aux xive-xve siècles dans les Chroniques de Kano et dans Makrizi. Malgré l'absence de documents, il semble que leur « ethnie » se soit constituée au cours du haut Moyen Âge, dans la vallée du Sénégal et les régions adjacentes de l'Est et du Nord-Est, par apports berbères et surtout noirs à cette souche originelle. C'est en tout cas de ces derniers que provient, dans ses structures essentielles, la langue peule, qui appartient incontestablement au même ensemble que le wolof et le serer-sin, actuellement parlés dans la République du Sénégal.
À partir du xve siècle, les sources, plus nombreuses, indiquent une extension des Peuls vers le sud et surtout vers l'est, dans des conditions au reste mal connues mais certainement liées à la fois aux vicissitudes politiques internes et externes et à la quête de pâturages. Dès le xviie siècle, ces migrations amenèrent les Peuls à occuper une bonne partie de leur habitat actuel, mais sans y exercer en général la prééminence politique. Les deux siècles suivants au contraire virent se constituer à leur profit plusieurs États importants, en Guinée (xviiie s.), au Mali et surtout au Nigeria-Cameroun (xixe s.) ; États qui, vaincus et soumis par la conquête européenne, n'en devaient pas moins subsister à des degrés divers pendant la période coloniale et parfois au-delà.
L' islam, qui était présent dans certaines communautés peules dès le xive siècle au moins, constitua le moteur de ces transferts de forces entre les Peuls et leurs voisins, transferts qui résultèrent de « guerres saintes » menées à l'appel de personnages religieux, Karamoko Alfa en Guinée, Ousmân Foduye (Osman dan Fodio) au Nigeria, Sêkou Ahmadou et El Hadj Omar au Mali, contre les suzerains musulmans déclarés « infidèles » ou des chefs et des populations non peuls (voire parfois peuls) demeurés animistes. Il en résulta à la fois une extension de l'islam et de nouveaux établissements peuls, notamment en Guinée, dans la partie moyenne du Nigeria et au Cameroun. Parallèlement, l'accession au contrôle de terres considérables et à la domination sur un grand nombre de non-Peuls assujettis ou capturés lors de razzias accéléra le métissage et la sédentarisation des vainqueurs qui, sans cesser d'être éleveurs, abandonnèrent la vie nomade, pratiquée aujourd'hui par une minorité, et se livrèrent aussi, par l'intermédiaire de leurs captifs, aux activités agricoles.
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Écrit par
- Pierre Francis LACROIX : professeur à l'Institut national des langues et civilisations orientales de l'université de Paris-III
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