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PHARAON

Un rôle religieux

Dans tous les temples du pays, le culte se fait au nom de Pharaon et le clergé n'est que son délégué. C'est pourquoi dans les scènes figurées des temples, c'est toujours le roi qui est représenté accomplissant le rituel divin journalier. Ce rituel, extrêmement précis, est indispensable à la simple survie du Monde, ce qui explique que l'absence de roi, au cours d'un inter-règne par exemple, soit ressentie comme une catastrophe cosmique qui peut affecter la course du soleil ou la crue du Nil. Décrivant la période troublée entre la XIe et la XIIe dynastie, pendant laquelle il n'y eut pas, semble-t-il, de pharaon régulièrement intronisé, un texte peut écrire (il s'agit d'une prophétie post eventum) : « Le disque solaire étant voilé, il ne brillera plus [...] On ne vivra plus car les nuages [le] recouvriront. Et les hommes seront [comme] abasourdis [...] Les fleuves d'Égypte étant à sec, on pourra traverser l'eau à pied. » L'arrivée d'un nouveau roi remet le monde en ordre, car il rétablit Maât à sa place et s'oppose au Chaos qui, en l'absence d'un pharaon légitime, avait repris possession du monde (prophétie de Neferty).

Pour pouvoir remplir ce rôle vital, Pharaon a besoin d'une force magique considérable. Certes, sa naissance divine est indispensable, mais elle ne suffit pas. Le surcroît de puissance nécessaire à sa fonction, il l'acquiert par les rites de l'intronisation, lorsqu'il prend les cinq noms de sa titulature. Le sacre comporte des scènes complexes et nombreuses, au cours desquelles des prêtres jouent le rôle des dieux, notamment celui d'Horus et de Seth, chargés de transmettre au nouveau souverain les couronnes de la Haute et de la Basse-Égypte. L'Égypte, en effet, a toujours été conçue comme un double royaume dont l'unité n'est assurée que par et dans la personne de Pharaon. C'est pourquoi, lors du sacre, les cérémonies sont toujours accomplies deux fois : l'une pour le royaume du Nord, le Delta, l'autre pour celui du Sud, de Memphis à Assouan.

La puissance magique accumulée dans la personne de Pharaon grâce aux cérémonies religieuses du sacre a tendance à s'atténuer peu à peu, et, après trente ans de règne, une fête spéciale, la fête-Sed, ou fête du Jubilé, est destinée à redonner à Pharaon la force qui s'est affaiblie au cours du règne. La fête-Sed, célébrée à l'origine sous le patronage du dieu Ptah de Memphis, reprend, en partie au moins, les cérémonies du sacre. On s'est demandé si elle ne remplaçait pas un rite de l'Égypte primitive, au cours duquel le roi était mis à mort rituellement lorsque, trop âgé, il ne pouvait plus assumer physiquement les charges de la royauté. On peut noter, à ce propos, que le sacrifice du roi devenu vieux est une tradition de certaines tribus du haut Nil, où ce sacrifice était encore pratiqué il y a quelques années. Quoi qu'il en soit, la première fête-Sed, célébrée après trente ans de règne, pouvait être suivie d'autres, à intervalles plus courts, chaque fois que le pharaon éprouvait le besoin de renouveler ses forces. Certains souverains célébreront jusqu'à trois fêtes-Sed successivement.

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Écrit par

  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de l'université de Lille

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Médias

-4000 à -2000. Naissance de l'écriture - crédits : Encyclopædia Universalis France

-4000 à -2000. Naissance de l'écriture

Le dieu Horus et le pharaon Horemheb - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Le dieu Horus et le pharaon Horemheb

Triade d'Osorkon II représenté en Osiris et encadré d'Isis et d'Horus - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Triade d'Osorkon II représenté en Osiris et encadré d'Isis et d'Horus

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