PHARMACODÉPENDANCE
Le phénomène de dépendance d'un individu vis-à-vis d'un médicament a été dénommé pharmacodépendance par l'Organisation mondiale de la santé (O.M.S.), qui en a donné la définition, internationalement admise, suivante : « État psychique et quelquefois également physique résultant de l'interaction entre un organisme vivant et un médicament, se caractérisant par des modifications du comportement et par d'autres réactions, qui comprennent toujours une pulsion à prendre le médicament de façon continue ou périodique afin de retrouver ses effets psychiques et quelquefois d'éviter le malaise de la privation. Cet état peut ou non s'accompagner de tolérance. Un même individu peut être dépendant à plusieurs médicaments » (O.M.S., Rapport technique no 407, 1969).
Cette définition sépare clairement les termes de tolérance et de dépendance, le premier ne désignant que l'atténuation progressive de l'effet d'une dose donnée de médicament lorsqu'elle est répétée — ce qui oblige à augmenter la dose pour retrouver l'effet — et n'entraînant pas obligatoirement un état de pharmacodépendance.
L'état de dépendance créé par l'utilisation de médicaments initialement prescrits à des fins thérapeutiques aboutit malheureusement à leur utilisation ultérieure, non justifiée par une raison médicale, par un individu devenu prisonnier d'un cercle vicieux très difficile à rompre. C'est alors l'abus du médicament, défini par l'O.M.S. comme « un usage excessif, persistant ou sporadique, incompatible ou sans rapport avec un emploi médical acceptable ». Dans ce cas, la pharmacodépendance devient de la toxicomanie, et le médicament une drogue, son utilisation étant déviée de son but thérapeutique.
Ce sont principalement les médicaments psychotropes, c'est-à-dire ayant un tropisme psychique, qui provoquent une modification de l'activité mentale, qui peuvent induire chez l'homme un état de pharmacodépendance : substances morphiniques (héroïne le plus souvent, morphine, codéine, opium, morphiniques de synthèse plus rarement), pentazocine, qui est à la fois antimorphinique et morphinomimétique, amphétamines et leurs dérivés, hypnotiques barbituriques (sécobarbital, amobarbital, pentobarbital le plus souvent), hypnotiques non barbituriques (méthaqualone), cocaïne, cannabis et autres préparations à base de chanvre (marijuana, kif, bhang, ganja, haschisch) dont la substance psychoactive commune est le D9-tétrahydrocannabinol ou D9-THC. Pour chacune de ces catégories de substances la dépendance (et la tolérance) possède des caractéristiques propres.
La dépendance psychique est une compulsion à prendre un médicament de façon périodique ou continue pour ressentir à nouveau ses effets : euphorie, sensation d'échapper aux agressions extérieures, exaltation de l'imagination, hallucinations ou paix intérieure, etc. Elle est d'intensité variable suivant les médicaments : forte pour les morphiniques (caractère constant quel que soit l'individu) et les amphétamines, très forte pour la cocaïne, modérée ou forte pour les barbituriques et le cannabis, variable mais généralement peu accentuée pour les hallucinogènes.
Les effets psychiques peuvent dépendre du mode d'utilisation du médicament. Ainsi, les substances morphiniques, et surtout l'héroïne, comme les amphétamines offrent au sujet une sensation brutale, intense, transitoire, si l'administration est faite par voie veineuse. La dépendance peut être croisée entre différents médicaments d'une même classe pharmacologique. C'est le cas pour les substances morphiniques et les barbituriques de façon partielle. Un sujet dépendant à l'héroïne peut ainsi recourir à un autre dérivé morphinique pour satisfaire son état de manque.[...]
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Écrit par
- Edith ALBENGRES : responsable du centre de pharmacologie au centre hospitalier intercommunal de Créteil
Classification
Médias
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