PHÉROMONES
Le transfert d'informations par signaux chimiques entre individus d'espèces différentes ou entre individus de la même espèce est courant chez les êtres vivants. Cependant, on réserve le terme de « phéromone », du grec pherein (transporter) et hormân (exciter), aux signaux chimiques intervenant dans la communication intraspécifique. Il a été introduit en 1959 par Karlson et Lüsher, qui en ont donné la définition suivante : « Une phéromone est une substance (ou un mélange de substances) qui, après avoir été sécrétée à l'extérieur par un individu (émetteur), est perçue par un individu de la même espèce (récepteur) chez lequel elle provoque une réaction comportementale spécifique, voire une modification physiologique. »
Comme les hormones, les phéromones sont produites par des glandes spéciales, elles agissent en quantités infinitésimales et sont spécifiques.
Par opposition aux hormones, elles ne sont pas déchargées à l'intérieur d'un organisme, mais au contraire elles sont émises à l'extérieur. Les hormones interviennent dans les phénomènes de régulation à l'intérieur d'un même organisme, alors que les phéromones servent à communiquer entre organismes de la même espèce.
Pour respecter l'étymologie, on a quelquefois utilisé, surtout chez les auteurs d'expression française, le terme « phérormone », mais celui-ci est maintenant complètement abandonné pour des raisons phonétiques.
Classification et mode d'étude
On a proposé diverses classifications des phéromones. Karlson (1960), se fondant sur leur mode de perception, les subdivise en deux catégories, selon qu'elles agissent par voie olfactive ou par voie gustative. Wilson (1962), établissant son jugement sur leur mode d'action, distingue les pheromones de déclenchement (releaser pheromones, des auteurs anglo-saxons) et les phéromones modificatrices (primer pheromones).
Les phéromones de déclenchement produisent un changement immédiat et réversible dans le comportement du récepteur.
Les phéromones modificatrices élaborent une suite de modifications physiologiques chez le récepteur, sans aucun changement immédiat dans son comportement. Ces modifications physiologiques le rendent apte ensuite à l'acquisition d'un nouveau répertoire comportemental, qui pourra se manifester lors d'une situation donnée.
Les principales phéromones de déclenchement sont les phéromones sexuelles (attractives ou aphrodisiaques), d'alarme, de piste, d'agrégation, de marquage de territoire, etc.
Les phéromones modificatrices interviennent dans le déterminisme des castes chez les insectes sociaux. Elles ont surtout été observées chez les abeilles où la « substance royale » produite par la reine en est une illustration. Cette substance inhibe en effet le développement des ovaires des ouvrières, et les empêche de construire des cellules royales à l'intérieur de la ruche.
Une phéromone ne correspond pas à un seul constituant chimique ; elle est en général formée d'un mélange en proportions bien définies de différents constituants élémentaires. On parle souvent d'ailleurs de « bouquet phéromonal ». C'est la composition qualitative et quantitative du mélange qui assure alors la spécificité du message ; plusieurs constituants élémentaires peuvent être partagés par des espèces différentes.
L'étude des phéromones n'a pu être réalisée que grâce aux progrès de la biologie moléculaire, de la biochimie et de l' éthologie. Il faut d'abord mentionner le prodigieux développement des techniques d'analyse physico-chimique, en particulier la chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse. Parallèlement ont été mises au point des méthodes de plus en plus fines d'observation et de quantification des comportements des organismes en [...]
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Écrit par
- Charles DESCOINS : docteur ès sciences physiques, chef du département de phytopharmacie et d'écotoxicologie de l'Institut national de la recherche agronomique, directeur du laboratoire des médiateurs chimiques de l'I.N.R.A.
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