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GUSTON PHILIP (1913-1980)

Peintre américain. Grand amateur de bandes dessinées, Philip Guston (né Philip Goldstein en 1913 à Montréal au Canada, il adopte son nom d'artiste en 1935) se voit, à l'âge de treize ans, offrir des cours de dessin par correspondance à la Cleveland School of Cartooning, avant de s'inscrire un an plus tard à la Manual Arts High School de Los Angeles, où il rencontre Jackson Pollock. Imprégné aussi bien par l'œuvre des artistes de la Renaissance que par les avant-gardes allemandes et le surréalisme, le jeune artiste peine à trouver une voie qui sera détournée, en 1931, par quelques participations mineures dans des productions hollywoodiennes.

Mais Guston, plongé dans des ouvrages théologiques et philosophiques, délaisse rapidement l'univers cinématographique pour se sensibiliser à la cause marxiste, qui le rapproche à nouveau des arts plastiques par l'intermédiaire des peintres muralistes mexicains – à commencer par David Alfaro Siqueiros et José Clemente Orozco, dont il pourra admirer les réalisations conçues à Los Angeles. Coauteur, avec Herman Cherry et/ou Reuben Kadish, de larges fresques à consonance politique, peintes aussi bien en Californie qu'au Mexique, Guston rejette, au début des années 1930, à l'instar des muralistes mexicains, toute optique visant à échafauder un « art pour l'art » coupé des tensions sociales ou raciales. En témoignent les peintures réalisées autour du thème du Ku Klux Klan : dès 1930 (Conspirators), elles introduisent le motif de l'homme cagoulé qui hantera une grande partie de la production à venir du peintre.

Se laissant convaincre par Pollock de le rejoindre à New York, Guston émigre en 1935 sur la côte est, où il abandonne progressivement le réalisme social, fût-il teinté de réminiscences surréalistes, pour s'imprégner, via le peintre Burgoyne Diller, d'une sensibilité plus abstraite. Tiraillé entre sa volonté de s'appuyer sur un langage lisible et son aspiration à développer une conception plus allégorique et symbolique, influencée par l'œuvre de Max Beckmann et celle de Pablo Picasso, Guston ne parvient pas pour autant à se frayer un chemin au sein d'une école de New York plus encline à épouser les thèses modernistes.

C'est, selon ses propres mots, dans la « solitude du Middle West », où il accepte un poste de professeur à l'université d'Iowa, en 1941, que Guston trouve le moyen de « développer une imagerie personnelle pour la première fois de [sa] vie » – imagerie qui débouchera en 1947, à la suite de son retour dans les environs de New York, sur une voie plus abstraite, assumée pleinement au début des années 1950, et qu'il déclinera dès lors à travers des dessins et peintures tributaires des grilles de Piet Mondrian et de la calligraphie orientale.

Devenu l'une des figures emblématiques de l'expressionnisme abstrait, Guston intègre en 1955 la galerie de Sydney Janis à New York, qui en est la vitrine officielle. S'ensuit une décennie marquée par de nombreuses expositions, aux États-Unis comme en Europe, culminant avec une importante rétrospective itinérante inaugurée en 1962 au Guggenheim Museum de New York. Celle organisée en 1966 par le Jewish Museum de la même ville, autour de ses peintures et dessins récents, laisse entrevoir une fissure dans sa production : des formes, à défaut de figures, semblent refaire surface au sein d'une œuvre encore abstraite.

Cette fissure ne cessera de s'affirmer, pour déboucher, autour de 1967-1968, sur une œuvre renouant avec une figuration que l'artiste aura (telle est du moins la lecture rétrospective que l'on peut en proposer) refoulée pendant plus de quinze ans. Se sentant plus que jamais oppressé par l'esthétique moderniste en vigueur dans les cercles new-yorkais, Guston ressent, à un moment où sa nation est enlisée dans le conflit[...]

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Écrit par

  • : maître de conférences en histoire de l'art contemporain à l'université de Valenciennes, critique d'art, commissaire d'expositions

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