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AGHION PHILIPPE (1956- )

Un conseiller des princes 

Intellectuel engagé, Philippe Aghion est naturellement consulté par les dirigeants politiques français. En 2007, il est membre de la commission Attali pour la « libération de la croissance française » établie par le président Nicolas Sarkozy. En 2010, dans un rapport à la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, il défend l’autonomie des universités en prenant exemple sur les modèles anglo-saxons. En 2012, il soutient, avec une quarantaine d’économistes français, le candidat socialiste à l’élection présidentielle, François Hollande. Cinq ans plus tard, ses analyses issues du corpus de la social-démocratie en font l’un des principaux inspirateurs du programme d’Emmanuel Macron, auquel il apporte son soutien.

L’autorité de la chaire que Philippe Aghion se voit confier au Collège de France en 2015 lui permet de poursuivre la diffusion de ses idées. La première d’entre elles porte bien sûr sur l’importance de l’innovation, qui lui vaut le qualificatif de « néo-schumpéterien ». Selon lui, le processus de « destruction créatrice » cher à l’économiste autrichien doit devenir la priorité d’un « Étatstratège ». L’innovation est au cœur de la création de richesses et doit être favorisée par tous les moyens (concurrence, fiscalité, subventions avisées), laissant une place cruciale à l’État.

Une deuxième idée-force de l’économiste concerne les effets de l’automatisation. À rebours des thèses pessimistes véhiculées tant dans le débat public que par une partie du monde académique, Aghion voit dans celle-ci une source d’efficacité, de profits et donc de développements favorables à l’emploi. À cet égard, il considère l’intelligence artificielle comme une technologie bienvenue que les acteurs économiques ont intérêt à favoriser. De son côté, l’État devrait veiller à assurer la formation appropriée des employés qui se trouveraient particulièrement affectés par ces évolutions, sans perdre de vue que l’innovation est un puissant levier de mobilité sociale.

De ce postulat découle, en troisième lieu, une appréciation nuancée des inégalités économiques. Selon Aghion, ces dernières sont négatives lorsqu’elles résultent d’un phénomène de « capture du régulateur », théorisé par l’économiste américain George Stigler, et qui voit une autorité publique servir des intérêts particuliers et ainsi entretenir des rentes. Aussi, une juste redistribution des revenus et une démarche de compensation auprès de ceux qui seraient les perdants de certaines réformes doivent être mises en œuvre. Cependant, les inégalités ne doivent pas faire l’objet d’idéologies catégoriques, mais plutôt être résorbées par la mobilité sociale, elle-même favorisée par l’innovation et l’éducation.

— Olivier MARTY

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Écrit par

  • : enseignant en économie européenne à Sciences Po et à l'université de Paris

Classification

Média

Philippe Aghion - crédits : Éric Piermont/ AFP

Philippe Aghion