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DESCOLA PHILIPPE (1949- )

Spécialiste de l'Amazonie, Philippe Descola a été titulaire de la chaire d' anthropologie de la nature au Collège de France de 2000 à 2019. Son parcours scientifique l'a conduit de la philosophie à l'anthropologie, en passant par l'observation de terrain intensive. Le « scandale logique » suscité par sa rencontre avec des sociétés dont les représentations du monde diffèrent radicalement des nôtres a été le déclencheur de sa recherche.

Né en 1949, Philippe Descola fut l'élève de Maurice Godelier à l'École normale supérieure de Saint-Cloud de 1970 à 1975, et effectua des études de philosophie et d'ethnologie à l'université de Nanterre. Avec son épouse Anne-Christine Taylor, il a conduit de 1976 à 1979 des recherches chez les Achuar, un groupe jivaro de l'Amazonie équatorienne, en vue d'une thèse soutenue en 1983 sous la direction de Claude Lévi-Strauss. Maître de conférences à l'École des hautes études en sciences sociales en 1987, puis directeur d'études en 1989, il a été nommé professeur au Collège de France en juin 2000.

La double influence de Maurice Godelier et de Claude Lévi-Strauss a inscrit les premiers travaux de Philippe Descola dans le cadre des débats entre marxisme et structuralisme. Il s'agissait de savoir comment la logique des classifications symboliques détermine les pratiques sociales. Philippe Descola reprit la notion lévi-straussienne de schème pour critiquer l'écologie culturelle alors en vogue aux États-Unis, laquelle expliquait les représentations symboliques par leur adaptation à l'environnement.

L'enquête ethnographique conduisit en effet Descola à mettre en lumière le rôle joué, chez les Achuar, par le schème de prédation, qu'il définit comme « un style de relation aux humains et aux non-humains fondé sur la capture de principes d'identité et de substances vitales réputées nécessaires à la perpétuation de soi ». Un tel schème, qui gouverne à la fois les pratiques de chasse et les conduites guerrières, est structuré par l'opposition entre consanguins (individus reliés par le sang) et affins (individus reliés par l'alliance). Les animaux chassés sont traités comme des affins, à la manière des groupes humains voisins et potentiellement ennemis, tandis que les plantes cultivées sont traitées comme des consanguins, c'est-à-dire nourries et « maternées ».

Cette opération ethnographique mettait en cause la notion philosophique de nature. Descola, dans le sillage de Lévi-Strauss, a d'abord conçu le schème de prédation comme une projection de catégories culturelles sur des entités naturelles. Mais une telle conception supposait une dichotomie entre nature et culture comme deux mondes séparés, là où les Achuar parlaient plutôt d'un ensemble continu de relations. À la suite de Bruno Latour, Philippe Descola a donc mis en cause la coupure entre nature et culture opérée par la modernité européenne, pour décrire comment des « collectifs » – par contraste avec les « sociétés », composées seulement d'individus humains – rassemblent humains et non-humains dans un réseau de relations spécifiques.

Une telle remontée de l'ethnographie amazonienne (observation) vers l'anthropologie de la nature (généralisation) s'effectue dans trois ouvrages qu'on peut classer dans les genres « scientifique », « littéraire » et « philosophique ». La Nature domestique (1986) est une étude rigoureuse, à la fois qualitative et quantitative, des pratiques des Achuar à l'égard de la nature. Les Lances du crépuscule (1993) est un récit à la première personne, à la façon de Tristes Tropiques de Lévi-Strauss, sur les relations entre groupes sociaux, ainsi qu'entre humains et non-humains, dans l'ensemble jivaro. Enfin, Par-delà nature et culture[...]

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Écrit par

  • : directeur de recherche CNRS, membre du Laboratoire d'anthropologie sociale

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Les quatre modes d'identification des humains aux non-humains proposés par Philippe Descola - crédits : Encyclopædia Universalis France

Les quatre modes d'identification des humains aux non-humains proposés par Philippe Descola

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