PHILIPPE Ier LE MAGNANIME (1504-1567) landgrave de Hesse (1509-1567)
Prince ambitieux et valeureux, le landgrave de Hesse a été pendant vingt ans le chef incontesté des protestants, au point de constituer un danger pour Charles Quint. Pourtant Philippe Ier a eu une jeunesse difficile : ayant perdu son père à l'âge de cinq ans, il est proclamé majeur en 1518. Aussitôt humilié par le rusé chevalier de Sickingen, il prend l'habitude de gouverner seul, sans consulter les états et en limitant le rôle de ses conseillers. Il se consacre surtout à la politique extérieure. Il s'allie par son mariage à la puissante maison de Saxe et adhère à la ligue souabe.
Sur le plan social il devient le défenseur du statu quo en matant en 1523 la révolte nobiliaire de son adversaire Sickingen, puis en 1525 il est le premier prince à écraser les paysans insurgés en Hesse et en Thuringe. Par contre, le landgrave est attiré très tôt par la Réforme. Dès 1521, il prend contact avec Luther à Worms ; très impressionné par un entretien avec Melanchthon, il adhère à la Réforme en 1524. À la diète de Spire, en 1526, l'électeur Jean de Saxe et lui apparaissent comme les chefs des princes qui s'opposent à la ligue des princes catholiques constituée en 1525. Il utilise le recès pour édifier une Église territoriale originale. Sur les conseils de Lambert d'Avignon, il fixe ses structures au synode de Homberg sur une base presbytérale qu'il doit abandonner devant l'opposition de Luther. Il utilise les biens ecclésiastiques pour créer quatre hôpitaux et surtout l'université de Marburg, la première université fondée sans bulle romaine (1527).
Mais la Réforme lui permet aussi, par l'exercice du pouvoir épiscopal, de renforcer son autorité sur l'Église et la noblesse. Par la suite, l'Église est consolidée par l'ordonnance disciplinaire de 1539, influencée par Bucer, et par celle de 1566. Elle manifeste une certaine originalité, tant par sa structure que par ses orientations théologiques, dépassant une orthodoxie étroite par désir d'unifier tous les protestants et admettant une relative tolérance des anabaptistes. Le landgrave, soucieux d'ouverture, est un des princes les plus versés dans la théologie par une étude biblique approfondie ; il a une opinion personnelle assez sûre et il est conscient de sa responsabilité devant Dieu.
Désireux d'unifier tous les évangéliques pour en faire une force politique capable de faire céder l'empereur et le pape, il organise en 1529, entre Luther et Zwingli, le colloque de Marburg, que la question de la Cène fait échouer. Promoteur de la ligue de Smalkalde, il noue une correspondance étendue avec Zwingli et Bucer pour une grande alliance anti-impériale. Il atteint son apogée avec la conquête du Wurtemberg (1534) et la Concorde de Wittenberg, qui permet le développement du luthéranisme en Allemagne du Sud. Mais sa bigamie, tolérée en secret par Luther, Melanchthon et Bucer, est devenue publique et le rend passible de la peine de mort selon la loi impériale, bloquant ainsi son activité politique. Il se soumet à Charles Quint moyennant l'inertie de la ligue dans l'Empire. Mais comme il dépouille le duc de Brunswick de ses terres, il est mis avec l'Électeur de Saxe au ban de l'Empire, ce qui provoque la guerre de Smalkalde (1546). Vaincu, il se rend à Charles Quint qui, rompant sa parole, le maintient pendant cinq ans dans une dure captivité.
Après sa libération, il se consacre surtout à la reconstruction de la Hesse, qu'il gouverne en monarque absolu. Moins actif désormais sur le plan allemand, il tente de jouer un rôle de médiateur dans les conflits théologiques intraprotestants et de secourir les huguenots en 1562. Personnalité attachante et généreuse, d'où son surnom de Magnanime, il a été desservi par sa bigamie qui a entravé son action. Alors qu'il a fait de son landgraviat un des territoires[...]
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Écrit par
- Bernard VOGLER : docteur ès lettres, professeur d'histoire de l'Alsace à l'université de Strasbourg-II
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Autres références
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SMALKALDE LIGUE DE
- Écrit par Bernard VOGLER
- 470 mots
Alliance défensive conclue en 1531 par les princes allemands luthériens contre l'empereur Charles Quint. Après la diète d'Augsbourg (juin 1530), dont le recez menace les protestants d'une campagne militaire, les signataires de la Confession d'Augsbourg se réunissent à Smalkalde...