MAUPAS PHILIPPE (1939-1981)
Le premier vaccin efficace contre l’hépatite B
C’est dans un contexte de forte compétition que le premier vaccin contre l’hépatite B a été mis au point en 1976 par Philippe Maupas et son équipe de la faculté de médecine de Tours. Maupas part du constat établi entre 1960 et 1963 par Baruch Blumberg, chercheur américain alors à l’université de Pennsylvanie chez qui Maupas séjourne en 1974, que le sang des malades souffrant d’une hépatite B chronique possède des quantités importantes de la protéine constituant la capside (structure protégeant le génome) du virus de l’hépatite B. Cette protéine est organisée en microsphères de 22 nanomètres de diamètre qui ressemblent à un virus mais qui ne contiennent pas le matériel génétique du HBV (particules Dane). Ces microsphères ne sont donc pas infectantes. En outre, elles induisent une forte réponse immunitaire chez l’animal. L’hypothèse plutôt audacieuse a été de partir du sang de malades chroniques pour en extraire la protéine virale, la débarrasser de tout contaminant éventuel, l’inactiver par le formol et préparer un vaccin pour l’homme.
Mis au point en peu de temps, ce vaccin a été testé entre 1975 et 1976 sur des membres volontaires du personnel à haut risque des centres de dialyse rénale et de transfusion sanguine de Tours. L’innocuité et l’efficacité du vaccin étant prouvées, l’équipe de Maupas publie ses travaux en 1976 (« Immunisation against hepatitis B in man », in The Lancet, no 7974, pp. 1367-1370, 1976). Le vaccin est ensuite développé et testé en parallèle au Sénégal, en collaboration avec la faculté de médecine de Dakar. Dans ce pays fortement touché par l’hépatite B, l’idée est de vacciner les enfants peu après la naissance. Une fois encore, les résultats sont très positifs (« HBV infection and hepatoma : epidemiological, clinical and virology study in Senegal. Perspective of prevention by active immunization », in M. Essex et al., Viruses in naturally occurring cancer, vol. 7, pp. 481-508, Cold Spring Harbor Press, 1980).
Déjà largement utilisé pour le personnel à risque, le vaccin reçoit son autorisation de mise sur le marché en 1981. Il est exploité jusqu’à la fin des années 2000, mais est progressivement remplacé à partir de 1985 par des préparations vaccinales élaborées à partir de protéines virales produites par voie biotechnologique. Entre-temps, la régression de la fréquence des cancers du foie est bien observée dans les zones de forte endémicité et de forte couverture vaccinale, à Taïwan en particulier. La protection contre l’hépatite B protège secondairement contre le cancer du foie (protection dite « en cascade »). On retrouve le même principe dans un vaccin comme celui contre l’herpès qui protège en cascade contre le cancer du col de l’utérus. Les possibles accidents du vaccin contre l’hépatite B, en particulier la suspicion de cas de sclérose en plaques post-vaccinale, n’ont pas été confirmés par l’épidémiologie et ne justifient nullement la crainte de cette vaccination.
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Écrit par
- Gabriel GACHELIN : chercheur en histoire des sciences, université Paris VII-Denis-Diderot, ancien chef de service à l'Institut Pasteur
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