PÉTAIN PHILIPPE (1856-1951)
La gloire
Le « vainqueur de Verdun »
Lorsque les Allemands déclenchent la bataille de Verdun, Joffre le nomme, le 24 février 1916, commandant du secteur. C'est sa chance et le début de sa gloire. Ayant fait échouer le pilonnage ennemi et contenu les attaques, il devient le « vainqueur » de Verdun. Promu grand officier de la Légion d'honneur, il est mis, le 1er mai, à la tête du groupe d'armées du Centre. En fait, cette promotion vise à l'éloigner du champ de bataille. Joffre lui préfère Nivelle pour reprendre le terrain perdu à Verdun. Autre « vainqueur » de la bataille, ce dernier est choisi comme généralissime quelques mois après. Mais c'est à Pétain que l'on fait appel le 15 mai 1917 pour réparer l'échec de l'offensive de Nivelle sur le Chemin des Dames et reprendre en main une troupe épuisée, démoralisée, parcourue de mutineries. Son sang-froid, les améliorations apportées à l'ordinaire, son souci de « ménager le sang » du soldat renforcent sa popularité auprès des « poilus ». S'il prépare une grande attaque en Alsace, il attend que « les chars et les Américains » lui assurent l'avantage. Mais Foch, plus flamboyant, s'impose pour coordonner les armées alliées et conduire un assaut final dont Pétain critique les modalités. Il critiquera, peu après, la signature, trop rapide d'après lui, de l'armistice. Il devient maréchal de France le 19 novembre 1918, mais Joffre et Foch ont été honorés avant lui.
L'oracle
Une autre vie commence alors : il est élu à l'Académie des sciences morales et politiques en 1919, se marie en 1920, achète une maison sur la Côte d'Azur, à Villeneuve-Loubet. Vice-président du conseil supérieur de la guerre de 1920 à 1931, inspecteur général de l'armée en 1922, véritable chef des armées, il affirme son autorité et supporte mal qu'on lui résiste. Pendant la guerre du Rif, il écarte Lyautey, partisan de la négociation, et écrase la révolte d'Abd-el-Krim en 1925-1926 avec l'armée espagnole. Il joue un rôle essentiel dans les choix stratégiques du pays. Lui qui, pendant la guerre, était soucieux de renverser les rapports de forces grâce au matériel moderne, se mue en sceptique définitif. Il entend protéger la France derrière un rempart « infranchissable » sur lequel les chars viendront s'écraser. Il est à l'origine de la ligne à laquelle le ministre de la Guerre André Maginot donne son nom. Homme de la défensive, c'est à cette fin qu'il reste intéressé par l'aviation. Sa Préface au livre du général Chauvineau Une invasion est-elle possible ? (1938) le montre muré dans ses certitudes. Héroïsé par la nation et par les anciens combattants, il est devenu le symbole de la victoire. Il est élu académicien français à l'unanimité en 1929 (sur le fauteuil laissé vacant par la mort de Foch...). Dans le contexte troublé des années 1930, il rassure à droite comme à gauche. Gaston Doumergue le nomme ministre de la Guerre dans le gouvernement d'union nationale mis en place après l'émeute du 6 février 1934. Face au Front populaire, une partie de la droite voit en lui un recours. C'est une hypothèse qui ne lui déplaît pas, même s'il laisse à d'autres, dans la presse conservatrice de Paris (Le Figaro) et de province, le soin de faire campagne pour lui. Mais il garde la réputation d'être un « républicain », ce qui ne contribuera pas peu à sa légitimité en 1940. Le 24 mars 1939, le radical Édouard Daladier l'envoie comme ambassadeur auprès du général Franco pour renouer avec l'Espagne. Alors que la déroute se profile, Paul Reynaud le fait entrer au gouvernement le 18 mai 1940 en tant que ministre d'État, vice-président du Conseil. Il ne se satisfait pas d'un rôle symbolique. Pour lui, l'effondrement est[...]
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Écrit par
- Jean-Marie GUILLON : professeur émérite des Universités
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