QUINAULT PHILIPPE (1635-1688)
Dramaturge, librettiste et poète français. Bien que Quinault soit fils d'un boulanger, Tristan l'Hermite le prend sous sa protection et l'introduit à l'hôtel de Guise. Il débute très tôt au théâtre avec une comédie fort bien enlevée, Les Rivales (1655), qui obtient un triomphe. C'est le début d'une carrière exceptionnelle durant laquelle il ne connaîtra que le succès. Très attentif à l'évolution du goût, exploitant habilement les voies ouvertes par d'autres, devanciers (Rotrou) ou rivaux (Thomas Corneille et plus tard Racine), Quinault fait jouer successivement des comédies inspirées du théâtre italien (La Comédie sans comédie) et du théâtre espagnol (Le Fantosme amoureux), puis des tragi-comédies dont Amalasonte (1657) et La Mort de Cyrus (1658) qui, mêlant la galanterie et l'héroïsme, marquent un progrès très net du romanesque. Il ne réussit pas moins dans la société que sur la scène : il obtient des succès mondains flatteurs, fait en 1660 un riche mariage, acquiert une charge de valet de chambre ordinaire du roi et se voit accorder d'importantes gratifications. Il écrit alors, à côté d'une excellente comédie, La Mère coquette (1665), des tragédies où domine le plus souvent le pathétique : Astrate (1665), Pausanias (1668), Bellérophon (1671)... La tendresse fade de ses personnages qui ne songent qu'à aimer (Boursault déclare qu'aucun auteur n'a tant de fois conjugué ce verbe) fait pleurer tout Paris. Mais Racine est apparu, et Quinault, devenu auditeur à la Chambre des comptes et ayant songé un moment à la retraite, se tourne vers un genre neuf où il va obtenir de nouveaux succès : à partir de 1672, il écrit le livret des opéras que Lully fait jouer à la Cour. Chaque année ou presque, les deux associés, dont la collaboration ne sera que momentanément interrompue, donnent une « tragédie lyrique », depuis Cadmus et Hermione (1673) jusqu'à Armide (1686) : la poésie harmonieuse et un peu molle du librettiste, qui excelle dans le vers libre, heureusement soutenue par la musique et la mise en scène, trouve dans l'opéra un cadre à sa mesure où elle fait merveille. Comme il avait su donner le spectacle de héros sensibles et distingués à un public raffiné qui aimait les larmes, Quinault contribue maintenant à offrir à son siècle l'image enchantée de sa propre splendeur. Cet homme à qui tout a réussi ne manque même pas sa sortie : ayant renoncé au théâtre, il exprime le regret d'avoir toute sa vie peint la passion sous un jour si séduisant. D'autres œuvres sont plus importantes ; mais celle de Quinault a su plaire et recèle encore aujourd'hui des beautés. Jusque dans ses faiblesses, elle constitue un témoignage essentiel sur l'évolution de l'art dramatique (pour ne pas parler de la part prise à la création de l'art lyrique) et sur les goûts du public au xviie siècle ; à ce titre elle demeure importante.
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Écrit par
- Bernard CROQUETTE : agrégé de l'Université, maître assistant à l'université de Paris-VII
Classification
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