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PHILON D'ALEXANDRIE (20 av. J.-C. env.-45)

Représentant le plus éminent de l'école philosophique juive d' Alexandrie qui interprétait la Bible selon les catégories hellénistiques, Philon a laissé une œuvre qui est dans sa majeure partie un vaste commentaire de la Torah. Cette œuvre est une source précieuse de renseignements sur le judaïsme de l'époque et un témoignage essentiel sur l'exégèse alexandrine de l'Ancien Testament. Elle est à la fois la somme et la résultante de ces efforts de la pensée juive affrontée à l'hellénisme, qui ont jeté un pont entre la révélation biblique et la philosophie grecque. L'éclectisme philonien interdit de parler de synthèse philosophique, il est bien plutôt une vision religieuse du monde, fidèle aux affirmations bibliques traditionnelles : grandeur du Dieu unique, élection d'Israël. Cette vision intègre nombre de concepts philosophiques puisés aux diverses écoles grecques (épicurisme excepté), sans recherche de cohérence. La culture hellénistique vient illustrer les données bibliques et, assurément, elle en transforme souvent le sens.

Philon, qui était contemporain du Christ, n'a connu ni ce dernier ni ses disciples, mais c'est pourtant grâce à des mains chrétiennes que son œuvre a survécu. Elle a exercé une grande influence sur l'école chrétienne d'Alexandrie, sur Clément et Origène, et par là sans doute sur beaucoup de Pères de l'Église. Ceux-ci découvraient chez Philon les principes et la mise en œuvre de l'exégèse allégorique, exégèse qui permettait d'évacuer certaines difficultés du sens littéral. Mais ils trouvaient davantage : l'expérience spirituelle d'un croyant qui avait déjà assumé dans sa foi juive les recherches des écoles grecques sur la connaissance de Dieu, de l'homme et du monde.

Philon le Juif et ses œuvres

Philon naquit à Alexandrie dans une riche famille juive. Un de ses frères, Caius Julius Alexander, possesseur d'une immense fortune, prêta des sommes importantes à la famille des Hérodes. Membre d'une aristocratie juive privilégiée, Philon, son œuvre le montre, reçut une éducation complète, juive et hellénistique. Il était un notable de la communauté israélite d'Alexandrie, comme en témoigne l'événement le plus marquant de sa vie : en 39-40, il fut envoyé par ses coreligionnaires auprès de Caligula à la tête d'une délégation ; il s'agissait d'intervenir auprès de l'empereur sur la question irritante des effigies impériales dans les synagogues et de négocier un statut politique des Juifs. Pendant cette mission mouvementée, où éclata la nouvelle que Caligula voulait faire élever sa statue au temple de Jérusalem, Philon fit preuve de courage et de fidélité au judaïsme. On ignore tout de ses dernières années.

Bien qu'écrites en grec, les œuvres de Philon sont toujours citées sous leur titre latin. Il est difficile de les classer suivant un genre déterminé. Certaines sont plus historiques et apologétiques : In Flaccum (contre le gouverneur Flaccus, qui avait favorisé un soulèvement populaire contre les Juifs d'Alexandrie), Legatio ad Caium (ambassade auprès de Caligula), Apologia pro Judaeis (qui contient une notice sur les esséniens), De vita Mosis, De vita contemplativa (sur les thérapeutes). D'autres écrits sont plus philosophiques : Quod omnis probus liber sit (où quelques pages traitent des esséniens), De aeternitate mundi, De Providentia, Alexander. Mais la plus grande partie de l'œuvre de Philon est exégétique ; elle comprend trois ensembles de commentaires du Pentateuque : l'Exposition de la Loi (De opificio mundi, De Abrahamo, De Josepho, De Decalogo. De specialibus legibus, De virtutibus, De praemiis et poenis), le Commentaire allégorique de la Loi (Legum allegoriae, De cherubim, De sacrificiis, Quod deterius, De posteritate Caini[...]

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