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PHOTIUS (810 env.-env. 895) patriarche de Constantinople (858-867, 877-886)

Un des esprits les plus complets qu'ait connus le Moyen Âge ; un acteur privilégié de la métamorphose de Byzance, à l'aube de la dynastie macédonienne.

Photius était de souche patricienne ; ses parents et ses grands-parents s'étaient distingués dans l'administration. Son oncle Taraise avait été prôtoasecretis (« chef de la chancellerie »), puis patriarche. Au mépris de la loi, sa famille avait toujours vénéré les icônes, et ses parents étaient, pour défendre cette cause, morts en exil.

Après avoir déjà fait un premier tour du savoir de son temps, Photius, qui n'a guère plus de vingt ans, est admis dans les bureaux de la chancellerie. Vers 843, il devient prôtoasecretis. Un peu plus tôt ou un peu plus tard — 837 ou 855 —, il fait partie d'une ambassade chez les Arabes. À la même époque, il anime et domine un cénacle où l'on se presse à ses cours de logique, de dialectique, de mathématiques et de théologie. Mais ses goûts le portent vers la critique philologique et littéraire. C'est alors qu'il compose la Bibliothèque, qui suffirait à sa gloire : 280 ouvrages de la littérature grecque, dont plusieurs, sans lui, n'auraient pas laissé de traces, y sont mentionnés, analysés, jugés, parfois largement cités. Tous les genres sont admis, sauf la poésie. Photius y exerce un esprit critique étonnamment agile et rigoureux. Son Lexique, véritable travail de « séminaire », fournit une clé pour la lecture des grandes œuvres classiques et de la Bible. Sous une forme plus littéraire, les Amphilochia, écrits au déclin de sa vie, répondent à la même préoccupation.

En 858, le césar Bardas dépose le patriarche Ignace, un moine ignare autant que vertueux. Photius, encore laïc, lui succède. La collusion du parti ignatien et du pape, compliquée d'un conflit de juridiction entre le patriarcat et la papauté à propos de la Bulgarie, porte les antagonistes à des extrémités. Photius dénonce les hérésies latines et, en concile (867), dépose Nicolas Ier. Basile Ier, qui s'est emparé du trône sur ces entrefaites, rappelle Ignace et exile Photius, qui est excommunié par un contre-concile (869-870). L'affrontement, qui clarifiait trop brutalement une situation inéluctable, imposa un sursis au triomphe de Photius. Mais celui-ci tenait une autre victoire : les Rôs, qui dix ans plus tôt avaient terrorisé la capitale, recevaient leur premier évêque ; en 864, Photius avait baptisé le roi Boris de Bulgarie ; et, dès lors, il était bien résolu à imposer sa juridiction sur le pays. Dans l'intervalle, ses amis Cyrille et Méthode s'en étaient allés porter les rudiments de la religion et de la culture chez les Slaves occidentaux.

La disgrâce fut courte. Basile Ier rappela bientôt Photius, nommé précepteur des héritiers du trône. La mort d'Ignace fit le reste. En 879-880, Photius se faisait réhabiliter par un concile. Les légats romains furent conciliants, le patriarche plus habile encore. Il recouvrait son honneur sans se renier. Sa Mystagogie, qui est un peu son testament, est une réfutation du Filioque ; et il n'admet pas plus qu'auparavant la primauté romaine. Il prend alors la pleine mesure de la grandeur de son Église. Dans l'Épanagogê, sorte de préface à la nouvelle codification du droit, il élabore une constitution idéale qui fixe les fonctions jumelles des deux pouvoirs suprêmes : l'empereur et le patriarche.

Déposé de nouveau par Léon VI, Photius meurt obscurément à une date inconnue, mais dans la communion, au moins formelle, avec Rome, contrairement à ce qu'on a cru jusqu'à nos jours.

La personnalité de Photius échappe à l'historien contemporain par bien des aspects : par le fond de son caractère ; par certains traits de la sensibilité (la poésie le laisse froid) ; par sa piété (« orthodoxe », certes, jusqu'à la moelle,[...]

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section)

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