PHOTOGRAPHIE (art) Vue d'ensemble
La photographie, mode d'expression récent au regard des autres arts, est désormais omniprésente dans la vie quotidienne et dans le langage. Les artistes qui l'utilisent exclusivement n'ont plus de peine à être reconnus. Cette légitimation, cependant, n'intervient qu'au bout d'une longue histoire qui met en jeu notre conception même de la représentation et de l'œuvre d'art. En effet, la polémique concernant la reconnaissance du médium photographique en tant qu'art s'est engagée dès son invention en 1839 et s'est longtemps poursuivie, notamment à travers la concurrence et l'influence réciproque des autres formes artistiques (du pictorialisme dès 1900 au pop art et à l'hyperréalisme des années 1960). La question a perduré lors de l'intégration tardive, dans les années 1980, de la photographie au marché de l'art.
Mais l'essentiel de ce qu'on pourrait appeler l'acte photographique réside dans le bouleversement qu'il induit dans notre rapport aux images et à notre conception de l'œuvre d'art comme « objet unique ».
Dès le daguerréotype, le procédé technique autorise une reproduction fidèle du référent (un paysage ou un personnage par exemple), où toutes les proportions sont conservées exactement, sans véritable intervention humaine. Aussi les photographies, dans le vaste domaine des images, appartiennent-elles aussi bien aux beaux-arts, à l'illustration qu'aux arts appliqués. Car une des propriétés intrinsèques de la photographie tient à son mode de présentation (négatif, épreuve, image numérique) infiniment duplicable et reproductible, rendant cette prise de vue identique sous différents matériaux et formats. Cette matrice (le négatif photographique) remet ainsi en cause l'unicité de l'œuvre d'art et suppose sa dématérialisation. Les possibilités de reproduction de la matrice sont en effet illimitées, et toute épreuve peut également être répliquée par une nouvelle prise de vue. Cette hypermultiplicité, déjà présente avec la gravure et la lithographie, s'est développée au xixe siècle avec l'invention de la photogravure qui permet la reproduction à volonté de la photographie imprimée, donnant ainsi naissance à la presse illustrée de photographies en noir et blanc puis en couleur.
La part spécifique de l'auteur intervient tant dans le choix de l'objet photographié que dans la maîtrise du processus photographique (chambre noire puis appareil photographique, temps de pose...), bien qu'elle ait été souvent décriée quand la capacité oculaire-manuelle du photographe n'était pas reconnue comme spécifiquement artistique.
Les photographies, qui révèlent et mettent en avant sur un espace réduit quantité de choses qui passaient inaperçues dans le paysage, font toutefois leur entrée dans les ateliers des artistes (Degas, Courbet entre autres), modifiant ainsi leur regard direct et leur approche du sujet traité sur la toile. C'est ainsi que les notions de cadrage et de point de vue photographique viennent influer sur le tableau. Les peintres qui, précédemment, structuraient leur tableau en fonction de l'espace clos de la toile, vont se permettre par exemple de couper des figures par le champ du cadre, introduisant ainsi un mouvement et une visée qui semble vraie, et qui est proche de l'instantané obtenu par la photographie.
Documentation, sciences et techniques, famille, tourisme, illustration dans la presse, publicité, cartes postales... En peu de temps, la photographie est devenue un médium incontournable. Sa maniabilité et ses capacités de reproduction, notamment, en ont fait un élément indispensable dans la circulation des images. Un phénomène qu'accentue l'avènement du numérique.
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