PHOTOMÉTRIE
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Applications de la photométrie
Éclairage
Dans la plupart des cas, on utilise pour l'éclairage des sources lumineuses dont la couleur dite blanche rappelle celle de la lumière naturelle du soleil ; mais pour certaines applications particulières (éclairage public, balisage de piste aérienne, lampes de laboratoire, etc.), on se sert de sources colorées.
L'éclairage électrique est, de loin, le plus fréquent, pour des raisons de commodité et d'économie. Les arcs au charbon ne se retrouvent que dans certains projecteurs et dans les phares.
Parmi les lampes couramment utilisées, on distingue essentiellement les lampes à incandescence, les lampes à décharge et les lampes fluorescentes. Aux lampes à incandescence à filament de carbone dans le vide ont succédé celles à filament de tungstène en atmosphère d'azote, d'argon ou de krypton, atmosphère qui limite la volatilisation du filament et permet d'améliorer la couleur, ainsi que le rendement, avec une luminance accrue ; ces lampes fonctionnent à près de 3 000 K, avec une durée de vie de l'ordre de mille heures.
L'une des caractéristiques les plus importantes des lampes dites lampes à iode est la reconstitution quasi totale de leur filament en cours de fonctionnement. On introduit dans l'atmosphère inerte de la lampe une quantité de vapeur d'iode dosée avec précision. Cette vapeur capte le tungstène volatilisé pour former, au voisinage de la paroi (le plus souvent en quartz), de l'iodure de tungstène, WI2, lequel, quand il parvient à proximité du filament, se décompose en libérant du tungstène qui se dépose à son endroit d'origine. Cette activité chimique particulière permet d'utiliser des températures encore plus élevées que dans les lampes classiques. L'usage des lampes à iode s'étend peu à peu à l'éclairage public, aux phares d'automobiles, et certains modèles sont prévus pour la photographie et le cinéma.
Le principe des lampes à décharge consiste à faire éclater et à entretenir dans un gaz convenablement choisi (vapeurs de sodium, de mercure, d'hydrogène, de xénon, etc.) une décharge électrique. Les lampes fluorescentes à basse tension sont constituées d'un tube en verre ayant une électrode à chacune de ses extrémités ; à l'intérieur du tube règne une faible pression de vapeur de mercure, et la paroi est recouverte de substances fluorescentes. Après mise sous tension, un arc se forme entre les deux électrodes, créant un rayonnement ultraviolet intense, qui se transforme en radiations visibles par l'intermédiaire des poudres fluorescentes. Le montage électrique de ces lampes doit être réglé soigneusement pour éviter tout papillotement appréciable.
L'usager doit payer non pas la puissance rayonnée, mais la puissance consommée, compte tenu des pertes de chaleur dans les circuits électriques. Le rendement indiqué dans la colonne de droite du tableau 4 se rapporte à la puissance consommée ; à côté du rendement, on doit considérer le coût de l'énergie utilisée, le prix d'achat du matériel et sa durée de vie.
Il faut éviter, dans le champ visuel, la présence de régions ayant une luminance ou une intensité trop élevée, qui entraîne une contraction pupillaire et des effets d'éblouissement bien connus des automobilistes roulant la nuit. La luminance maximale considérée comme tolérable est de l'ordre de 106 nits.
En présence de sources ayant des luminances plus élevées, on utilise des diffuseurs ou des réflecteurs. Cela permet de mieux diriger la lumière, de la répartir sur les surfaces à éclairer, d'arrêter certains rayonnements dangereux tels que l'ultraviolet et de contribuer à la décoration des locaux ainsi qu'à la protection des lampes contre les intempéries.
L'éclairage est dit indirect quand la lumière est projetée vers une surface claire qui la réfléchit en la diffusant. Ce type d'éclairage atténue les ombres et réduit ainsi le relief des objets, la source étant complètement masquée, cela au prix d'une importante perte de lumière.
Les projets d'éclairage sont établis en évaluant le flux lumineux F nécessaire et sa répartition. On calcule F en multipliant les éclairements désirés par la surface des zones à éclairer, et en tenant compte des pertes par réflexion et transmission.
L'éclairement souhaitable varie selon qu'il s'agit de lieux de passage (vestibules, couloirs : 50 lux min.), ou de salles de lecture et de pièces où l'on exécute des « travaux fins » (300 lux min.).
Phares et projecteurs
Les phares destinés à être vus de loin, pour le repérage d'une direction ou d'un obstacle, et les projecteurs qui éclairent une route à suivre ou un objectif, ou encore un monument ou une scène de théâtre, utilisent une source de luminance L et de surface Σ, placée au foyer d'un système optique réflecteur ou d'un réfracteur de surface S et de longueur focale f (fig. 17). Si le faisceau utile n'est pas trop ouvert, le flux lumineux reçu par cette optique est sensiblement F = LΣS/f 2. L'ensemble des rayons issus de l'optique forme à peu près un tronc de cône d'angle solide Ω = Σ/f 2. L'éclairement produit à la distance x est sensiblement (aux pertes près) :

τ étant le facteur de transmission de l'ensemble des pièces optiques et de l'atmosphère. Le phare se comporte donc, dans la région éclairée (aux pertes près, d'ailleurs importantes), comme une source d'intensité LS (ce produit est souvent appelé « puissance » du phare). Il y a intérêt à utiliser autant que possible des arcs de grande luminance et des optiques de grandes dimensions. On est limité, notamment, par la nécessité de former, à partir de chaque point de la source, un faisceau bien parallèle, ce qui interdit, S étant choisie, une valeur trop faible de f. Quant aux dimensions de la source, elles conditionnent, une fois f et S choisies, l'ouverture des faisceaux, qu'on se fixe selon l'utilisation prévue.
On trouvera dans les articles qui les concernent des indications sur les caractéristiques photométriques des instruments d'observation. Rappelons seulement que la luminance L′ de l'image (non ponctuelle) d'un objet de luminance L est :

n et n′ étant les indices de réfraction des milieux objet et image, et τ le facteur de transmission des milieux interposés.
Le rapport des éclairements des images rétiniennes, qu'on appelle la clarté C est, par suite, sensiblement égal à τ n′2/n2, tant que les diamètres de pupille oculaire dans la vision instrumentale (soit œ′) et dans la vision directe (soit œ) sont égaux. Mais quand le grossissement G est assez grand, œ′ devient inférieur à œ, et C est réduite sensiblement dans le rapport : œ′2/œ2.
Dans l'observation des étoiles ou des particules ultramicroscopiques, en admettant que les flux F′ et F qui pénètrent dans l'œil, armé ou non de l'instrument, se concentrent sur les mêmes éléments rétiniens, on définit la clarté C* comme le rapport F′/F ; on démontre que C* varie avec G selon la loi : C* = G2C.
Enfin, lorsqu'on forme des images réelles pour leur enregistrement photographique, on sait que leur éclairement varie à peu près en raison inverse du carré du « nombre d'ouverture » N = f /o, f étant la longueur focale de l'objectif, et o le diamètre de son diaphragme.
Dans tous les cas, la lumière parasite, résultant de réflexions sur la surface des verres et des montures, tend à voiler les images : elle doit être rendue aussi faible que possible, et ce sont encore des mesures photométriques qui permettent d'en juger.
Astronomie
La photométrie intervient en astronomie : on a mesuré la luminance du Soleil, de la Lune, et même celle du ciel nocturne (de l'ordre de 10—8 nit, s'il n'y a pas de nuages). Mais cette notion ne peut s'appliquer aux étoiles que l'on voit comme des points. On les caractérise par leur éclat stellaire, qui est l'éclairement e que produit leur lumière, après traversée de l'atmosphère, sur un écran normal aux rayons. On réunit sous l'expression de photométrie céleste toutes les mesures de flux d'énergie lumineuse, de l'infrarouge à l'ultraviolet, provenant de sources extérieures au globe terrestre, c'est-à-dire du Soleil, des planètes et de leurs satellites, des étoiles, des nébuleuses brillantes, des galaxies, qui relèvent de l'astrophysique, mais également les mesures de la lumière zodiacale, des aurores et du rayonnement du ciel nocturne, qui sont du ressort de la géophysique.
Une des difficultés de la photométrie céleste vient de l'interposition de l'écran plus ou moins absorbant que constitue l'atmosphère terrestre. Les progrès de la recherche spatiale ont diminué ce handicap. Seules les observations hors de l'atmosphère rendent possible l'étude de la répartition de l'énergie des spectres stellaires et solaire dans l'ultraviolet lointain arrêté par l'ozone atmosphérique. Elles permettent aussi une précision inégalable dans les mesures des rayonnements infrarouge, visuel et proche ultraviolet (cf. photographie).
Spectrophotométrie
La spectrophotométrie permet d'évaluer, longueur d'onde par longueur d'onde, les grandeurs énergétiques ou photométriques « monochromatiques » définies précédemment. On isole les bandes spectrales choisies au moyen d'instruments convenables, dits monochromateurs, derrière lesquels on place un photomètre sensible visuel (sans écran diffusant), thermique ou photoélectrique, ou bien l'on compare les photographies des spectres des lumières étudiées.
Les résultats relatifs aux courbes spectrales de sensibilité des récepteurs ou de transmission des matériaux ont un intérêt pratique évident, et l'étude quantitative des spectres complète leur étude qualitative (détermination des longueurs d'onde) en ce qui concerne l'application des théories de l'émission et de l'absorption.
La colorimétrie, la polarimétrie, la photoélasticimétrie et la pyrométrie optique sont fondées, au moins pour une part, sur des mesures photométriques.
Enfin, l'action de la lumière sur la nature vivante n'a pu être étudiée et réglée au mieux que grâce à son évaluation au moins approximative. C'est ainsi qu'on a pu exprimer les doses érythémales de rayonnement ultraviolet à ne pas dépasser sous peine de coups de soleil ou de lésions plus ou moins graves, et celles qui sont nécessaires pour obtenir des effets antirachitiques, par un produit kE*t, E* étant l'éclairement énergétique, t la durée de son action, et k un facteur d'efficacité dépendant de la composition spectrale et de l'application envisagée. L'unité de dose, appelée finsen, correspond à une puissance de 10 microwatts agissant sur un être humain pendant une minute, si la longueur d'onde du rayonnement est de 297 nanomètres.
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Écrit par
- Michel CAGNET : professeur à l'université de Paris-XI, Orsay, directeur des études à l'École supérieure d'optique, Orsay
- Pierre FLEURY : directeur honoraire de l'Institut d'optique théorique et appliquée de Paris, professeur honoraire au Conservatoire national des arts et métiers
Classification
Médias
Autres références
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BOUGUER PIERRE (1698-1758)
- Écrit par Encyclopædia Universalis
- 423 mots
Géophysicien français né le 16 février 1698 au Croisic, mort le 15 août 1758 à Paris, fondateur de la photométrie (mesure de l'intensité lumineuse).
Enfant prodige, Pierre Bouguer apprend avec son père, Jean Bouguer, l'hydrographie et les mathématiques. À la mort de ce dernier, il n'a...
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FOUCAULT LÉON (1819-1868)
- Écrit par Cyril VERDET
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...1835. Par la suite, Foucault collabore avec Hippolyte Fizeau (1819-1896), camarade de promotion au collège Stanislas, pour appliquer cette technique à la photométrie (mesure du rayonnement lumineux) dans le but de comparer les intensités lumineuses des étoiles. Après des travaux fructueux pendant quelques... -
LUMIÈRE, notion de
- Écrit par Jean MATRICON
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...spécifiquement ondulatoires comme les interférences et la diffraction devait balayer sans appel l'idée corpusculaire et permettre de bâtir un modèle du rayonnement lumineux remarquablement cohérent, explicatif et prédictif. La lumière est une onde, caractérisée par sa vitesse de propagation, grande,... -
PHOTOGRAPHIE - Sensitométrie
- Écrit par Bernard LEBLANC
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Pour les besoins usuels de la photographie, les unités photométriques visuelles sont utilisées (cf. photométrie). Les sources lumineuses sont donc caractérisées par leur intensité I, exprimée en candelas (cd), et leur luminance L, qui représente l'intensité de la source par unité de surface... - Afficher les 8 références
Voir aussi
- PHOTOMULTIPLICATEURS
- CORPS NOIR
- LUMINANCE
- LUMIÈRES HOMOCHROMES
- EFFICACITÉ LUMINEUSE
- LUX, unité
- PHOTOMÉTRIE CÉLESTE
- ÉCLAT, photométrie
- RÉCEPTEUR, physique
- CELLULE PHOTOÉMISSIVE
- ÉCLAIREMENT
- ÉMITTANCE, photométrie
- CANDELA, unité
- BOUGIE, unité
- BRILLANCE
- BLONDEL, unité
- BUNSEN PHOTOMÈTRE DE
- DENSITOMÈTRE
- PHOT, unité
- ORTHOTROPE SOURCE
- TALBOT DISQUE DE
- RITCHIE PHOTOMÈTRE DE
- STILB, unité
- LAMPE À DÉCHARGE
- LUMEN, unité
- LAMBERT LOI DE
- LUMMER & BRODHUN CUBE DE
- HÉTÉROCHROMES LUMIÈRES
- NIT, unité
- MICROPHOTOMÈTRE
- FINSEN, unité
- LAMPE, technologie
- CASCADE MÉTHODE DE, optique
- PAPILLOTEMENT MÉTHODE DE
- OBSERVATEUR MOYEN, optique
- VISION PHOTOPIQUE
- VISION NOCTURNE ou VISION SCOTOPIQUE
- PURKINJE EFFET
- PROJECTEURS
- PONCTUELLE SOURCE
- ÉCLAIRAGE
- CIE (Commission internationale de l'éclairage)
- INTENSITÉ LUMINEUSE
- MESURES OPTIQUES
- LAMPE À INCANDESCENCE
- LAMPE ET TUBE FLUORESCENTS