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PHOTOSCULPTURE

Dans un article qu'il consacre à la photosculpture, Théophile Gautier écrit en 1863 : « C'était déjà bien assez merveilleux. Le soleil dessinateur ; passe ; mais le soleil sculpteur ; l'imagination déconcertée se refuse à croire un semblable prodige. » La photosculpture est en effet la plus étonnante tentative d'art démocratisé par les techniques modernes sous le second Empire.

La découverte de la photographie, l'illusion d'une réalité enfin soumise grâce à elle, ont profondément secoué le climat artistique des années 1860. Son paroxysme, la photosculpture, résulte des espoirs inouïs fondés sur les nouvelles possibilités de l'image associée à la lumière. Un photographe qui était aussi sculpteur, François Willème (1830-1905), partisan de l'art industriel, met au point une méthode combinant la photographie et la sculpture pour reproduire le réel.

De 1863 à 1869, les Parisiens ont pu s'offrir, grâce à la Société générale de photosculpture, leur buste sculpté en un temps record pour un prix record ; Le modèle se tenait exactement au centre d'une rotonde de dix mètres de diamètre, le temps que vingt-quatre appareils photographiques disposés à égale distance réalisent simultanément vingt-quatre clichés. Puis les profils obtenus étaient projetés par un lampascope sur un écran transparent, à la taille de la sculpture souhaitée. Le profil projeté était ensuite reporté au moyen d'un pantographe sur un bloc de glaise. L'addition de l'ensemble des profils restituait avec une grande exactitude l'apparence du modèle.

L'invention de Willème remporta un grand succès tant à l'exposition de photographie qui s'est tenue au Palais de l'industrie des Champs-Élysées en 1863, qu'à l'Exposition internationale de 1864. En Angleterre, Antoine-François Claudet reprit et perfectionna la méthode. Une Société de photosculpture fut fondée à New York par Hutson et Kurtz en 1866. Willème remporta un dernier succès à l'Exposition universelle de 1867. D'autres techniques de reproduction industrielle comme la galvanoplastie ou les bronzes de Barbedienne se sont imposées et ainsi la photosculpture ne fut pas employée pour la reproduction des bronzes d'art. D'autre part, les portraits-bustes, même très bon marché, ne se sont guère popularisés et n'ont pu rivaliser avec le portrait photographique. Découragé par les difficultés financières, François Willème se retira des affaires et redevint photographe et sculpteur près de sa ville natale de Sedan. L'éphémère succès de cette entreprise puis son échec sont étroitement liés aux préoccupations artistiques du second Empire : imitation poussée parfois jusque la mimesis la plus absolue, credo moderniste d'un art démocratisé par l'industrie, toutes valeurs auxquelles s'opposaient les partisans de l'art pour l'art (voir l'article de W. Drost, « La Photosculpture, entre art industriel et artisanat. La réussite de François Willème », in Gazette des beaux-arts, oct. 1985).

— Sylvain BELLENGER

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