PHYSIQUE Les fondements et les méthodes
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La méthode en physique
Dans la présentation de la méthode par laquelle les lois de la physique sont généralement découvertes et établies, on laissera de côté les aspects méthodologiques qui permettent de la codifier ou de l'appliquer. Les progrès du xxe siècle, qui ont souvent abouti à construire des théories très éloignées de l'intuition commune, ont permis de clarifier les processus de la découverte et de la vérification et, en particulier, de rejeter la notion d'induction sur laquelle on avait cru pouvoir se fonder au xixe siècle, époque où les phénomènes étudiés étaient plus immédiatement représentables.
L'établissement d'une loi passe en général par quatre étapes :
– la réunion de données empiriques, le plus souvent quantitatives, grâce à l'expérience ; elles sont parfois reliées par des règles empiriques qui expriment certaines relations entre les données ;
– l'invention d'un schéma, c'est-à-dire, le plus souvent, d'un objet mathématique qui implique entre les données les relations qui sont observées par l'expérience ; à ce stade, il s'agit de la formation d'une hypothèse ;
– l'analyse détaillée du schéma mathématique conduite de manière à prédire, dans la mesure du possible, de nouvelles relations ; en d'autres termes, on détermine les prédictions contenues dans l'hypothèse ;
– la vérification par l'expérience de ces prédictions ; elle est considérée comme d'autant plus satisfaisante que celles-ci sont en plus grand nombre, davantage indépendantes les unes des autres et plus précises.
Ces diverses étapes sont plus ou moins marquées selon le cas, et certaines peuvent parfois être ramenées à l'évidence ou à la banalité, mais l'élaboration des théories complexes ou nouvelles, comme la mécanique quantique ou la relativité restreinte, est clairement passée par tous ces stades. Le temps et l'effort nécessaires à la réalisation de ce travail peuvent varier notablement selon les questions considérées.
Il est possible, à ce sujet, de faire un certain nombre de remarques. Il semblerait que la méthode indiquée ici soit, dans ses grands traits et même dans des cas élémentaires, très proche de l'acte psychologique qui consiste à « comprendre ». Dans la vie pratique cependant, les schémas mis en jeu sont rarement mathématiques, ils sont plutôt logiques ou consistent en une représentation spatiale.
Dans le même ordre d'idées, le rôle des mathématiques en physique est celui d'une représentation et, très souvent, ces dernières apparaissent donc comme une forme privilégiée du langage.
On désigne parfois le schéma mathématique sous le nom de modèle. Cette expression a l'avantage de souligner son rôle de représentation, mais elle suggère une vulnérabilité qu'il n'est pas toujours utile de faire apparaître. Il semble préférable de réserver ce terme de modèle à un schéma mathématique adéquat qui représente approximativement un nombre limité de faits, et de ne pas l'appliquer aux lois fondamentales. Ainsi, l'électrodynamique quantique recèle tous les aspects connus de la lumière, mais, dans certains cas, il est commode de représenter les effets que l'on discute par le modèle des particules (photons) ou par celui des ondes (champ électromagnétique). Dans une branche de la physique non encore totalement éclaircie, comme celle des particules élémentaires, un modèle est une organisation de certaines données partielles.
Malgré toutes les vérifications, il ne peut y avoir de certitude absolue sur la validité des lois, bien que le nombre énorme, la précision et la diversité des conséquences de la mécanique quantique, par exemple, ne puissent laisser au doute qu'une place minime (ce qui ne signifie pas que d'autres formulations, d'autres interprétations[...]
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Écrit par
- Roland OMNÈS : professeur à l'université de Paris-Sud, Orsay, doyen de la faculté d'Orsay
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