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CAMPORESI PIERO (1926-1997)

Professeur de langue et de littérature italienne à l'université de Bologne de 1969 à 1996, Piero Camporesi, né à Forli en 1926 et mort à Bologne en 1997, a commencé ses recherches scientifiques en faisant connaître au public dans les années 1960 les œuvres du critique littéraire Ludovico di Breme (Il Romitorio di sant'Ida, 1961 ; Lettere, 1966) et du dramaturge et poète Vittorio Alfieri (Estratti d'Ossian e da Stazio per la Tragica, 1969). Aux savoirs du critique littéraire et du philologue, il ajoute ceux de l'historien et de l'anthropologue par la publication du traité d'art culinaire La Scienza in cucina e l'arte di mangiar bene de Pellegrino Artusi en 1970 et de Il Libro dei vagabondi en 1973, qui ouvrent de nouveaux champs d'études dans ces domaines jusque-là très négligés de la réalité sociale, à savoir l'histoire de l'alimentation, de la culture itinérante et de la marginalité du Moyen Âge à l'époque moderne.

Ses recherches sur l'alimentation conduisent bientôt Camporesi à s'intéresser aux thèmes de la pauvreté et de la subsistance, en l'orientant vers l'étude des symboles, des représentations et des rites du boire et du manger : du pain au vin, des champignons au fromage, du lait au chocolat, etc. Au travers de la pauvreté, Camporesi s'intéresse aux vagantes : vagabonds, charlatans, simulateurs, bandits, bohémiens, experts dans l'art de la ruse et de la dissimulation... Puis il élargit son enquête aux métiers non sédentaires, des bergers aux colporteurs et chanteurs ambulants ; sans oublier ceux qui pratiquent l'art de la médecine – ars medendi –, tel ce médecin et chirurgien bolonais du xvie siècle, Leonardo Fioravanti, à qui Camporesi a consacré son dernier livre, Camminare il mondo.

Piero Camporesi a étudié avec une extrême finesse et une méthode assurée les rapports étroits et les échanges fructueux qui se sont opérés entre culture d'élite et culture populaire du Moyen Âge au xviiie siècle, s'éloignant des analyses trop dualistes d'un Mikhaïl Bakhtine ou d'un Jacques Le Goff. Il démontre comment la force créative et dynamique du comique populaire rapproche hautes et basses classes. C'est dans cette perspective que, stimulé par ses recherches sur le carnaval, l'érudit romagnol a proposé une relecture de l'œuvre du chanteur ambulant, natif de San Giovanni Persiceto, Giulio Cesare Croce (1550-1609), l'auteur de la légende de Bertoldo e Bertoldino, dans laquelle il reprend, pour le premier, les traits du personnage comique médiéval de Marculfo, et crée, pour le second, une de ces figures de niais qui prennent tout au pied de la lettre.

L'itinéraire scientifique de Camporesi apparaît absolument original non seulement par rapport à la recherche en Italie, mais aussi à l'étranger, où son œuvre est largement diffusée et traduite. L'embarras de certains critiques littéraires et la défiance de quelques historiens italiens ont quelque peu obscurci le succès de l'œuvre camporésienne, accueillie très favorablement par les anthropologues et les folkloristes, lue avec admiration par les écrivains, reconnue par le monde intellectuel et jusqu'à l'Académie, là où se déploient les « belles allées » (belle contrade) du savoir.

Figure singulière du paysage culturel du xxe siècle, nourri d'une passion pour la lecture et l'écriture, pour l'homme et son histoire, pour l'habileté et l'ingéniosité, Piero Camporesi a ouvert, par ses recherches, de larges horizons.

En puisant avec aisance aux sources les plus variées, il a créé un nouveau mode de lecture du passé, ce qui lui a permis d'aller au-delà des stylisations approximatives et de brosser des fresques complexes de la vie sociale, de ciseler avec finesse les portraits des êtres qu'il étudiait. La[...]

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