ABELIN PIERRE (1909-1977)
Né à Poitiers, c'est dans la Vienne que Pierre Abelin fera, à partir de la Libération, une longue carrière politique. Mais si son énergie fut centrée sur la politique, c'est dans les affaires qu'il débuta et réussit d'abord. Autant que les mandats et les portefeuilles ministériels, ce docteur en droit collectionna les titres d'administrateur de sociétés et les responsabilités dans l'industrie. Il fut tour à tour et parfois en même temps : directeur de l'Union française des industries exportatrices et du Comité d'exportation de l'industrie cotonnière ; directeur, durant l'Occupation, du Groupement national d'importation des cacaos et délégué général de la Chambre syndicale des chocolatiers et confiseurs ; président et vice-président de la Compagnie des chemins de fer franco-éthiopiens ; président-directeur général de la Société française de supermarchés et, enfin, administrateur de plusieurs sociétés de construction téléphonique.
Ces multiples activités ne font pas obstacle à une carrière politique. À trente-six ans, Pierre Abelin est élu député M.R.P. de la Vienne aux deux assemblées constituantes puis à l'Assemblée nationale, où il siégera jusqu'à sa mort, hormis dans les débuts de la Ve République, lorsqu'il fut emporté en 1958 par la vague gaulliste ; mais il reconquit son siège en novembre 1962. Maire de Châtellerault, de 1959 à sa mort, conseiller général à partir de 1964 et président du Conseil général de la Vienne à partir de 1967, il occupe aussi divers postes ministériels ; trois fois secrétaire d'État sous la IVe République, il revient au gouvernement après l'élection d'un président non gaulliste en 1974 (du 28 mai 1974 au 11 janvier 1976, il sera ministre de la Coopération). Il exerce aussi des fonctions politiques comme second de Jean Lecanuet en tant que secrétaire général du Centre démocrate, et vice-président du Centre des démocrates sociaux. Ce partisan farouche de la troisième force a consacré une grande part de son énergie et de sa ténacité à la réunion de la Démocratie chrétienne, des différents centrismes, du radicalisme et du socialisme démocratique. Il fut l'un des principaux promoteurs de la « grande fédération ». C'est chez lui que se réunissaient en 1965 Jean Lecanuet, Maurice Faure et Gaston Defferre. Mais la grande fédération ne vit pas le jour. Pierre Abelin s'engagea alors aux côtés de Lecanuet pour l'élection présidentielle de 1965, puis dans la construction du Centre démocrate, sans cesser de poursuivre le rêve de la grande fédération. Il lança, avec le socialiste André Chandernagor, le Mouvement pour une alternative de progrès puis le Mouvement réformateur, qui associait le démocrate-chrétien Jean Lecanuet au radical Jean-Jacques Servan-Schreiber. Ces initiatives ne connurent pas un franc succès, mais la réussite tant désirée viendra enfin. Au printemps de 1974, la mort prématurée de Georges Pompidou provoque des élections présidentielles. La majorité se divise : Jacques Chaban-Delmas représentant le gaullisme et Valéry Giscard d'Estaing le centrisme. Ce dernier réussit à distancer son concurrent grâce à l'alliance qu'il a scellée avec le Centre démocrate de Jean Lecanuet et Pierre Abelin. Pour celui-ci, c'est une revanche, mais aussi une certaine déception puisque, s'il revient au pouvoir après seize ans d'opposition, il doit partager ce pouvoir avec les gaullistes.
Le vieux lutteur livrera un dernier combat en 1975 aux élections législatives partielles et en 1976 aux élections cantonales, où il devra repousser les assauts d'une jeune candidate socialiste, Édith Cresson. Il sera remplacé comme maire de Châtellerault par sa femme et comme conseiller général par son fils.
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Écrit par
- Christian SAUVAGE
: chef du service politique du
Journal du dimanche
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