PIERRE AURIOL (1280-1322)
Théologien franciscain, né près de Gourdon, dans le Quercy. En 1304, Pierre Auriol étudie à l'université de Paris, où il suit peut-être l'enseignement de Jean Duns Scot. En 1312, il enseigne au studium generale des Frères mineurs de Bologne et, en 1314, à celui de Toulouse. Il est licencié en théologie en 1318. De 1318 à 1320, date de son élection à la charge de provincial d'Aquitaine, il enseigne à Paris. Il est nommé archevêque d'Aix en 1321. Auriol s'engagea dans la querelle qui divisait, à l'intérieur de l'ordre des Frères mineurs, spirituels et conventuels au sujet de la « pauvreté et de l'usage pauvre » ; il soutenait que l'usage pauvre n'est pas exigé par l'essence de la pauvreté. Au sujet de l'Immaculée Conception, il estime, contre les Dominicains, que Dieu préserva réellement la Vierge Marie du péché originel. Son Traité de la conception de la bienheureuse Vierge Marie (Tractatus de conceptione Beatae Mariae Virginis) fait apparaître, en outre, les principes qui guident son ecclésiologie. Dans son Traité des principes (De principiis, 1312), Pierre étudie : la matière et la forme en général ; le sens selon lequel les anges et les astres ont matière et forme ; la matière et la forme dans les éléments et les corps mixtes ; la matière et la forme, leur existence, leur rapport, dans les êtres animés, et spécialement dans les hommes (de ce sujet traite aussi son Commentaire du second livre des Sentences qui date de 1317-1318).
Pierre Auriol propose une théorie de la connaissance dont plusieurs points méritent d'être évoqués. Les concepts de connaissance intuitive et de connaissance abstractive lui paraissent essentiels pour résoudre le problème théologique suivant : à un homme vivant de la vie terrestre Dieu peut-il donner une lumière qui lui permette de connaître scientifiquement les vérités de la foi ? L'expérience montre non seulement la possibilité mais la réalité de la connaissance intuitive. Or le caractère absolu de la connaissance intuitive est tel que Dieu peut la maintenir alors que tout rapport à la chose a disparu, et que la chose elle-même, dont elle dépend du seul point de vue de l'efficience causale, n'existe plus. Elle est une connaissance directe, présentielle, actualisatrice de l'objet tandis que, par abstraction, les choses apparaissent d'une façon quasi imaginaire et comme absente. L'expérience montre encore que l'on doit, dans la connaissance sensible et à plus forte raison dans la connaissance intellectuelle, faire la distinction entre l'être apparent ou intentionnel et l'être réel. L'intellect place la chose devant son regard, dans l'être vu et objectivement apparent. Cette apparence est la chose connue intellectuellement. La connaissance est donc la pensée objective ou la chose en tant qu'elle apparaît.
Pierre Auriol en vient ainsi à une théorie de l'universel. La diversité des concepts de genre et de différence tient son origine de la diversité de perfection des impressions qu'une même chose simple peut produire. La diversité objective qui est celle des concepts résulte de la diversité formelle des impressions produites dans l'intellect. L'intellect ne conçoit ni son acte, ni l'objet connu en tant qu'il fonde la relation à l'acte de connaître, mais le concept objectif lui-même. Toute chose est par elle-même singulière, mais l'individuation par la quantité soustrait l'individu à l'appréhension de notre intelligence. D'autre part, il est impossible qu'une espèce ou similitude représente le singulier comme tel si elle ne le représente pas dans sa situation propre. L'individu sera perçu non par l'intellect lui-même, mais par l'imagination à laquelle il est naturellement conjoint dans l'acte de connaître.[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Francis RUELLO : docteur ès lettres, diplômé de l'École pratique des hautes études, docteur en philosophie, professeur à l'Université catholique de l'Ouest
Classification