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BRAUNBERGER PIERRE (1905-1990)

Le producteur français Pierre Braunberger aura traversé le xxe siècle et marqué de son empreinte un large pan du cinéma français, de l'âge d'or du muet à la Nouvelle Vague et au-delà.

Né en 1905 à Paris, dans une famille de médecins israélites (Edmond Weil, son grand-oncle, fut le doyen de la faculté de médecine), Pierre Braunberger a le coup de foudre pour l'art naissant du cinéma en découvrant un épisode de Fantômas, de Louis Feuillade, à l'âge de sept ans. Il en a quinze quand il produit et réalise lui-même son premier film, un documentaire sur Francfort-sur-le-Main. C'est le point de départ d'une glorieuse carrière, qui va le conduire d'abord en Angleterre, puis aux États-Unis, où il acquiert les rudiments de son métier auprès du célèbre « nabab » Irving Thalberg. Entre 1926 et 1990, il produira, seul ou en participation (notamment avec son confrère Roger Richebé), quelque quatre-vingts longs-métrages, quinze moyens métrages et plus de deux cent quatre-vingts courts-métrages, sans compter les projets avortés, les films dont il assura la distribution dans sa salle parisienne du Panthéon, et ceux dont il supervisa en personne la mise en scène ou le montage : Paris 1900 (1946), La Course de taureaux (1951) et Corridas d'hier et d'aujourd'hui (1965). Palmarès qui unit à la quantité la qualité, puisque Pierre Braunberger peut se flatter d'avoir eu sous contrat, et parfois fait débuter, des cinéastes tels que Jean Renoir, Luis Buñuel, Marc Allégret, Marcel L'Herbier, Jean-Pierre Melville, Alain Resnais, Jean Rouch, Chris Marker, François Reichenbach, Agnès Varda, Jean-Luc Godard, François Truffaut, Claude Lelouch, Maurice Pialat et bien d'autres. Ses plus beaux fleurons se nomment Nana, La Chienne, Partie de campagne, Le Silence de la mer, Van Gogh, Guernica, Le Coup du berger, Moi un Noir, Tirez sur le pianiste, Cuba si, Muriel ou Le temps d'un retour. Sa dernière production, Les Chevaliers de la Table ronde, spectacle théâtral filmé de Denis Llorca, fut diffusé commercialement dix jours avant sa mort.

Quels sont les secrets de cette longévité et de cette fécondité créatrice ? D'abord, sans doute, une parfaite connaissance de l'art, de la technique et de l'industrie du cinéma, à travers ses hommes et ses œuvres, mais aussi de ses coulisses, où il déambulait à son aise. Ensuite, un flair prodigieux, qui lui permettait de détecter au premier coup d'œil le créateur de talent. Une habileté certaine à jongler avec les chiffres et à tirer profit des « moyens du bord ». Une forme de dilettantisme, combiné paradoxalement avec un haut professionnalisme. L'adversité ne l'a pourtant pas épargné : nombreux échecs commerciaux, faillites aussitôt redressées (sa société de production s'appela successivement Néo-Films, Établissements Braunberger-Richebé, Films du Panthéon, Films de la Pléiade, Films du Jeudi, et on en passe), pour ne rien dire des persécutions endurées sous l'Occupation. Tous ces obstacles furent surmontés le sourire aux lèvres. Son itinéraire pourrait se résumer en ces quelques titres qui jalonnent sa filmographie : Le Gagnant, Vie heureuse, La route est belle, Recherches, Cinéma cinéma, Ballade sur des fils...

Citons, pour conclure, cette profession de foi : « Il est nécessaire qu'un producteur de films s'intéresse à tous les genres, toutes les formes de la recherche artistique et du spectacle. Il doit toujours se sentir à l'affût. Pour le plaisir, pour la nouveauté, pour l'espoir de la découverte. »

— Claude BEYLIE

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur émérite à l'université de Paris-I, historien du cinéma

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