CHAREAU PIERRE (1883-1950)
Surtout connu comme décorateur, Pierre Chareau est un architecte important pour les années trente. Il mit en pratique des recherches cubistes, en introduisant dans l'architecture l'emploi de matériaux alors inconnus ou inusités (briques de verre) dans une structure nouvelle axée sur l'ouverture du système architectural, sur ce que Chareau tenait pour un matériau premier : la lumière. En 1919, il conçoit pour le docteur Jean Dalsace l'installation de deux pièces (bureau et chambre à coucher), ce qui lui vaudra au Salon d'automne sa nomination comme sociétaire. La plus grande partie des meubles de la « maison de verre » date de cette époque. Intéressé par la peinture et la musique, il se consacrera cependant à partir de 1919 de plus en plus à l'architecture. Pendant l'exposition de 1925, il exécute le bureau d'une ambassade (actuellement au Musée d'art moderne), avec Lipchitz et Jean Lurçat pour collaborateurs. En 1927, sa première construction importante, le club-house du golf de Beauvallon (Var), est animée par une très nette transcription des recherches cubistes. Cette réalisation se fait en collaboration avec l'architecte hollandais Bijvoet. Vers 1929, il commence les études pour la « maison de verre » du docteur Dalsace, rue Saint-Guillaume à Paris, qu'il réalisera en 1931 avec l'aide de Bijvoet. L'habitation clinique est une suite d'espaces dynamiques, un exemple d'habitation évolutive. Cette mobilité interne reflète la liberté avec laquelle cette maison fut pensée et construite. Pierre Chareau ne dessina les détails de la maison qu'au fur et à mesure de l'avancement du chantier ; pratiquement, il improvisa en n'utilisant que des éléments standardisés ou des matériaux couramment utilisés dans l'industrie. Une autre particularité propre à cette maison est sa transparence ; les deux murs de briques de verre placés de part et d'autre de la maison lui assurent un important éclairage naturel, tout en conservant à l'intérieur une grande intimité. En 1931-1932, il exécute à Paris des bureaux en dalles de verre et de cuivre pour L.T.T. (Light Tactical Transport). Ici aussi Chareau fait preuve d'ingéniosité malgré un programme sévère. Les locaux bien conservés n'accusent ni par leur agencement, ni par leur matériau, aucun des signes de vieillissement caractéristiques de l'architecture de cette époque. De 1932 à 1938, Chareau poursuit ses recherches, étudiant le problème de la mobilité des meubles (le salon ovale en coromandel et palmier qui changea plusieurs fois de destination et fut constamment modifié). En 1937, il innove, en créant les parois pliantes pour résoudre les problèmes d'éclairage et de chauffage (maison de campagne de Djémel Anik). C'est le prélude à la maison d'une seule pièce qu'il devait réaliser à New York avant sa disparition. En 1939, il se rend à New York. Il emploiera aux États-Unis les matériaux de récupération comme éléments de construction. La maison du peintre Robert Motherwell est construite à partir d'éléments de tôle provenant des surplus de l'armée. Avec les grandes vitres et les tôles d'une serre désaffectée, Chareau réalise deux étages avec chambre, salle de bains et cabinet de toilette. Attaché au service culturel de l'ambassade de France, Chareau dirige des expositions de peintures et de gravures anciennes et modernes. Sa dernière exposition portera sur Auguste Perret. Dans la maison à pièce unique d'East Hampton qu'il réalise pour lui-même, Chareau définit un espace vital autosuffisant. En regroupant les commodités et les lieux de repos et d'activité de veille dans un même volume, il introduit une technique d'habitat alliant la structure primitive de la case avec les problématiques contemporaines de répartition d'espace.[...]
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Écrit par
- Christian BONNEFOI : docteur en histoire de l'art, chargé de recherche à l'École pratique des hautes études
Classification
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PARIS
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