DAUNOU PIERRE CLAUDE FRANÇOIS (1761-1840)
Ancien oratorien français qui marqua, par une grande activité d'érudit et d'homme politique, la période révolutionnaire et le début du xixe siècle. Né à Boulogne-sur-mer d'un père d'origine agenaise, chirurgien de l'Amirauté, et d'une mère issue d'une famille d'apothicaires boulonnais, Daunou est le seul survivant, avec sa sœur aînée, de cinq enfants. Chétif et studieux, il est poussé par son oncle, prêtre du diocèse de Boulogne et futur révolutionnaire, vers l'Oratoire.
Il entre dans cette congrégation en 1777, brûle les étapes de régence et occupe à vingt-quatre ans la chaire de philosophie puis de second théologien au séminaire oratorien de Montmorency. Il n'accède aux ordres majeurs qu'après 1786, moyennant la constitution par son père d'un titre clérical de cent livres. Talent et patriotisme rachètent sa condition médiocre : l'Académie de Berlin lui décerne un premier accessit, en 1788, pour son Mémoire sur l'origine, l'étendue et les limites de l'autorité paternelle. Instigateur de la révolte démocratique des confrères de l'Oratoire en 1790, il anime la commune de Montmorency, où il prête le serment constitutionnel le 23 janvier 1791.
Plusieurs opuscules retentissants, dont l'anonyme Accord de la raison avec la Constitution civile du clergé (1791), le désignent à l'attention de l'épiscopat constitutionnel : sera-t-il vicaire épiscopal de l'ex-oratorien Porion, de Saint-Omer, ou directeur du séminaire parisien de l'évêque Gobel ? Il opte pour Paris, tout en entretenant des amitiés politiques qui lui assurent une nouvelle carrière.
Le 9 septembre 1792, élu conventionnel du Pas-de-Calais (sous l'influence de Robespierre), il quitte définitivement le clergé. Aucune fluctuation ne perturbera désormais son caractère ni ses préoccupations : il fait preuve d'un travail acharné pour la perfection d'une culture étourdissante, d'une honnêteté proverbiale fondée sur une clarté « classique », d'une grande pondération dans ses jugements littéraires et politiques, d'une passion froide et obstinée pour la défense des libertés républicaines, de beaucoup de respect et de bonté pour l'individu. Déjà spécialiste des questions de l'instruction publique, il montre ses compétences de constitutionnaliste en contestant à la Convention son pouvoir dans l'instruction du procès de Louis XVI. Classé comme « indulgent », il est, pour ses amitiés girondines, jeté en prison jusqu'au 9-Thermidor.
Sa ligne politique, illustrée d'une foule de rapports à la Convention, fait de lui un des tout premiers techniciens de la période du Directoire et du Consulat. Il quitte la présidence de la Convention pour celle des Cinq-Cents, qu'il occupe de 1795 à 1798, et devient une célébrité nationale avec ses deux grands discours, l'un sur la fondation de l'Institut de France et l'autre « Pour la célébration de la fondation de la République » (22 sept. 1798). Entre deux sessions du Conseil, il part réorganiser la République romaine après l'assassinat du général Duphot. Fut-il vraiment l'un des rédacteurs de la Constitution de l'an VIII ? Il avait mis sa marque personnelle au préambule (déclaration des droits) de celle de l'an III. Pour la suivante, il œuvre au sein de la commission intermédiaire, mais ne cesse de contrecarrer l'autoritarisme de Bonaparte, bien que l'ayant aidé lors du 18-Brumaire. Son opposition au pouvoir personnel s'affirme nettement lors de sa présidence du Tribunat, dont il est l'un des premiers à être éliminé en 1802. Cette disgrâce rompt sa carrière politique et lui en ouvre une autre : celle d'académicien et d'érudit, pour laquelle il décline la direction de l'Instruction publique.[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Bernard PLONGERON : docteur ès lettres et docteur en théologie, professeur à l'Institut catholique de Paris
Classification