COUBERTIN PIERRE DE (1863-1937)
Humaniste et visionnaire, Pierre Fredy, baron de Coubertin, est un personnage qui semble connu de tous. En effet, tous les deux ans désormais, son nom se voit largement évoqué par les médias à l'occasion de la tenue des jeux Olympiques, qu'ils soient d'été ou d'hiver : Coubertin est en effet l'homme qui, au terme d'un long combat et grâce à une ténacité farouche, permit la renaissance des jeux Olympiques. Mais sa vie et son œuvre ne sauraient se réduire à ce seul événement, malgré l'importance considérable qui est désormais la sienne : Coubertin fut avant tout un pédagogue désireux de réformer le système éducatif français et un écrivain prolifique à la pensée complexe.
Le pédagogue
Pierre de Coubertin est né le 1er janvier 1863 dans l'hôtel particulier familial situé 20, rue Oudinot, à Paris. Il est le dernier des quatre enfants de Charles Fredy, baron de Coubertin, un peintre à l'inspiration religieuse de quelque talent, membre de la Société des artistes français, et de Marie-Marcelle Gigault de Crisenoy, tous deux catholiques fervents et monarchistes convaincus. Élève des jésuites du collège de la rue de Madrid, à Paris, le jeune Pierre de Coubertin, très marqué par la défaite de 1870 et qui cherche la meilleure façon de servir son pays, est reçu à l'École interarmes de Saint-Cyr. Puis, désormais persuadé que l'Europe va vivre une longue période de paix, il démissionne et s'inscrit à l'École des sciences politiques, où il suit avec assiduité les cours de l'institution de la rue Saint-Guillaume. Allant à contre-courant des idées familiales, il s'enflamme pour la République ; mais, déçu par le sectarisme des partis, il renonce à s'engager en politique.
À vingt ans, il part pour l'Angleterre et découvre à Rugby l'œuvre pédagogique de Thomas Arnold, révélée en 1875 par La Vie de collège de Tom Brown, livre d'un disciple d'Arnold, Thomas Hughes. Coubertin, impressionné par la grandeur de l'Angleterre victorienne, revient persuadé que l'archaïsme du système éducatif français, notamment dans l'enseignement secondaire, est l'un des grands maux dont souffre son pays. Il se rendra également aux États-Unis, où il constatera que les préceptes de Thomas Arnold sont appliqués dans les grandes universités outre-Atlantique. Ses visites dans les public schools britanniques l'ont convaincu que, sous l'expression « sports scolaires », se dissimule un aspect fondamental de la formation morale et sociale des futures élites outre-Manche. Pour lui, transposer en France ces concepts et ce système permettra à la nouvelle génération de prendre conscience de ses forces et de ses responsabilités ; alors, le traumatisme de la défaite de 1870 s'estompera peut-être.
Coubertin entreprend donc dès 1883 de combattre ces fameux maux qu'il a identifiés et qui gangrènent l'enseignement secondaire français : dressage, conformisme, mensonge, manque d'hygiène et d'éducation corporelle. Aussi le sport devient-il une des composantes majeures du système d'éducation qu'il propose alors. Il multiplie les conférences pour propager ses idées, tente de convaincre l'Université de le suivre. Visionnaire, il comprend rapidement que la presse peut constituer un parfait vecteur pour diffuser ses idées : il publie dans Le Français, le 30 août 1887, un texte dans lequel il propose « pour reposer l'esprit, de former le corps et forger les volontés, par la pratique des jeux sportifs ». Durant l'Exposition universelle de 1889, il met sur pied le congrès des exercices physiques et des compétitions scolaires, dont le lauréat est le jeune Frantz Reichel, du lycée Lakanal, futur journaliste de renom. Armand Fallières, ministre de l'Instruction publique, impressionné par la manifestation, mandate Coubertin[...]
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Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
Classification
Média
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