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KLOSSOWSKI PIERRE (1905-2001)

Pour qui aborde Pierre Klossowski, la première épreuve est le trouble. Non que l'homme s'avance masqué. Il est au contraire volontiers son propre commentateur. Ni que son œuvre écrite et dessinée soit hermétique. Elle se réclame plutôt d'une syntaxe et d'une science des figures des plus classiques. Le mystère et la légende n'en demeurent pas moins, accrus et préservés à la fois par cette apparente immédiateté. Car très vite se révèle, sous l'hospitalité du ton, du style et du trait, ce qui résiste et se dérobe à la communication : une expérience, un univers, rares dans l'entrecroisement de leurs héritages et de leurs alliances.

« Les natures ne communiquent pas » : Pierre Klossowski aime à citer Duns Scot. Ses thèmes et leur lexique : simulacres, stéréotypes, irrésolution, indiscernable, discontinu..., ne cessent de nous le rappeler. Quelle que soit l'issue par laquelle vous pénétrez dans cette œuvre, une exhortation vous y est adressée d'emblée : ne cherchez pas l'auteur où et quand il se dissimule ; ne confondez pas votre regard avec le sien ni les deux avec l'objet de la vision ; méfiez-vous de l'illusoire communication ; ne mésestimez pas les ruses des démons dans la révélation de l'œuvre d'art.

Après le trouble, donc, l'initiation. Une emblématique, ses allégories, ses figures s'offrent au lecteur et au spectateur. Sous l'univers littéraire et pictural que saluèrent Maurice Blanchot, Michel Foucault et Gilles Deleuze, on découvre un univers théologique, lequel requiert la contemplation plus que l'interprétation, l'invocation du nom et la célébration de l'image plus que leur analyse.

Parrainages et rencontres

Cet homme, son œuvre présentent une énigme. Si la biographie, chargée de rencontres et de parrainages, peut la lever pour partie, c'est pourtant « en elle-même », selon le mot de Kierkegaard, « qu'elle porte sa loi et sa résolution ». Pierre Klossowski naît à Paris en 1905 dans un milieu voué à la peinture : son père, Erich Klossowski de Rolla, est historien de l'art, décorateur de théâtre et peintre. Sous le nom de Baladine, sa mère peint également, de même que son frère Balthasar, sous le nom de Balthus. Sur les jeunes années de Pierre Klossowski, se profilent les figures des amis de la famille : Bonnard, Rilke, Gide. Ainsi se confrontèrent puis retrouvèrent leur combinaison propre les influences majeures d'une personnalité faite de paradoxes : la fascination pour le paganisme helléno-romain et celle pour le christianisme, les cultes associés du verbe et de l'image, la passion pour l'histoire en même temps que le sens de l'inactuel, les héritages du Rhin, du Danube et du Tibre (Kafka, Hölderlin, Nietzsche et Heidegger, mais aussi Virgile, Ovide et Suétone) forment cette configuration « lotharingienne » que Klossowski avoue pour héritage. L'expérience de la vie religieuse, un bref passage par le protestantisme, les rencontres avec les RR. PP. Bruckberger et Daniélou, avec Louis Massignon, Marcel Moré et Marie-Madeleine Davy, les amitiés de Pierre Leyris et de Georges Bataille, la fréquentation du Collège de sociologie fondé par ce dernier avec Roger Caillois et Michel Leiris, le mariage avec Denise Morin-Sinclaire offrent des points de repère reconnaissables dans l'œuvre ultérieure sans qu'elle s'y épuise ni que son énigme en soit entièrement livrée. Car cette œuvre est un labyrinthe qui prolonge ses voies vers des domaines et des époques si hétérodoxes, voire si contradictoires, que leur coexistence, à défaut de leur impossible unité, doit être supposée chez l'individu singulier qu'est Pierre Klossowski plutôt que traquée dans ses effets lisibles ou visibles.

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    ...dans ses films sa réflexion sur le monde, l'image qu'on en a et celle qu'on en donne. Penser par images, sous forme de dessins, s'inscrit aussi, pour Pierre Klossowski, dans la continuité d'une œuvre littéraire et philosophique : à partir de quel moment une image s'impose-t-elle comme « motif », point...