FERROUD PIERRE-OCTAVE (1900-1936)
Le compositeur français Pierre-Octave Ferroud naît le 6 janvier 1900 à Chasselay, près de Lyon. Très jeune, il travaille le piano avec sa mère, qui avait été l'élève des pianistes et pédagogues Félix Le Couppey et Antoine-François Marmontel. Il entreprend des études scientifiques à l'université de Lyon mais sa rencontre avec Édouard Commette, organiste à la primatiale Saint-Jean de Lyon, qui sera son professeur d'harmonie, change l'orientation de sa carrière : il deviendra compositeur. Durant son service militaire, effectué à Strasbourg, il étudie le contrepoint avec Marie-Joseph Erb et la composition avec Guy Ropartz. Puis il se perfectionne au Conservatoire de Lyon auprès de Georges-Martin Witkowski et de Florent Schmitt, qu'il considère comme le plus proche de ses aspirations musicales et dont il va devenir l'ami et le disciple (il publiera en 1927 un ouvrage sur ce dernier, Autour de Florent Schmitt). En 1923, il s'installe à Paris, où il devient critique musical (Paris-Soir, Musique et Théâtre, Chantecler).
Très vite, Pierre-Octave Ferroud s'affirme comme l'un des créateurs les plus doués de sa génération. Malgré une vie écourtée par un accident d'automobile survenu près de Debrecen, en Hongrie, le 17 août 1936, il laisse une œuvre qui touche tous les genres avec une égale réussite. Son catalogue comporte des pièces pour piano – Trois Études (1918-1923) ; la suite Au parc Monceau (1921), qui établit sa réputation et qui sera orchestrée par la suite ; Prélude et forlane (1922) ; Types (1924) ; Sonatine (1928) ; Tables (1931) –, des mélodies – À contrecœur (1923-1925) ; Cinq Poèmes de Paul-Jean Toulet (1927) ; Trois Poèmes de Paul Valéry (1929) ; Trois Chansons de Jules Supervielle (1932) ; Trois Poèmes intimes de Goethe (1932) –, trois ballets – Le Porcher, qui connaît un grand succès lors de sa création à Paris, par les Ballets suédois, le 15 novembre 1924 ; Jeunesse (1933) et Vénus ou l'équipée planétaire (1935) –, un opéra bouffe d'après Tchékhov, Chirurgie, donné le 20 mars 1928 à Monte-Carlo. Dans son œuvre pour orchestre se détachent Sarabande (1920-1926), le poème symphonique Foules (1922), Sérénade (1929) et, surtout, la Symphonie en la (1930), commande de Serge Koussevitzky pour l'Orchestre symphonique de Boston, qui la crée à Paris le 8 mars 1931, sous la direction de Pierre Monteux. Mais c'est dans la musique de chambre que, selon Claude Rostand, Ferroud « semble avoir le mieux réalisé ses principes théoriques d'art objectif, sans d'ailleurs aller jusqu'à l'abstraction » : Sonate pour violon et piano (1928-1929) ; Sonate pour violoncelle et piano (1932) ; Trio d'anches, pour hautbois, clarinette et basson (1933) ; Quatuor à cordes (1934).
Le style de Ferroud reflète une nature contrastée oscillant entre une froide objectivité et une généreuse expressivité lyrique. Son langage est ainsi un curieux mélange de rudesse et de tendresse que magnifient ses dons remarquables d'orchestrateur. La volupté austère du contrepoint rivalise avec l'hédonisme d'un univers harmonique ne reniant ni la somptuosité ni l'opulence. Et, parmi les qualités d'une écriture avant tout rigoureuse, qui place l'harmonie au service du contrepoint – « C'est par le contrepoint que la musique atteint à cet universel dont elle est la langue, l'harmonie gardant toujours une couleur nationale », affirmait-il –, il faut aussi relever un sens dramatique inné, un goût prononcé pour le sarcasme (par exemple dans son opéra bouffe Chirurgie), une élégance et une vivacité quasi aristocratiques, un souffle structurel peu commun : sa Symphonie en la représente à cet égard une des plus puissantes architectures sonores qu'ait vu éclore l'entre-deux-guerres. Ne reniant pas les[...]
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Écrit par
- Alain FÉRON : compositeur, critique, musicologue, producteur de radio
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