ROYER-COLLARD PIERRE PAUL (1763-1845)
Fils d'un modeste propriétaire agricole de Sompuis dans la Marne, Royer-Collard reçoit une éducation classique et janséniste chez les Frères de la doctrine chrétienne à Chaumont et à Saint-Omer. Il appartient au barreau de Paris en 1787, puis, en 1789, il est membre de la Commune de Paris jusqu'au 10 août 1792. Député de la Marne au Conseil des Cinq-Cents en 1797, il est éliminé de cette assemblée comme monarchiste après le coup d'État du 18 fructidor. On le retrouve correspondant secret de Louis XVIII de 1799 à 1803. Professeur d'histoire de la philosophie à la Sorbonne en 1811, il introduit en France la doctrine spiritualiste de Thomas Reid et de Stewart. À la Restauration, il est nommé directeur de la Librairie, puis conseiller d'État, président du Conseil royal de l'Université, membre de l'Académie française en 1827. Député de la Marne, il inspire le groupe dit des doctrinaires, partisans d'une monarchie tempérée à mi-chemin de la démocratie et de l'absolutisme. Ses discours, modèles d'éloquence parlementaire, font autorité. Président de la Chambre de 1828 à 1830, il siège après la révolution de 1830 dans cette assemblée jusqu'en 1839, mais sans prendre part aux débats.
Homme politique devenu, à quarante-huit ans, professeur de philosophie pour trois ans à peine, Royer-Collard bénéficia pour son spiritualisme, dès sa première leçon, de la bénédiction de Napoléon lui-même qui se félicita alors de voir s'élever « dans son université une nouvelle doctrine très sérieuse qui pourra nous faire grand honneur et nous débarrasser tout à fait des idéologues en les tuant sur place par le raisonnement ». Cette doctrine, connue par les Fragments qu'édita Jouffroy en 1828 et hostile dès le départ à Condillac, s'opposait à une « philosophie de la sensation », d'inspiration « idéaliste », au nom d'une « philosophie de la perception » qui s'appuie sur l'évidence des croyances communes de l'humanité et des réalités immédiatement données à la conscience, sans se soucier ni de leur genèse ni de leur fondement. Selon cette philosophie sommaire, les réalités communes (le moi, la nature et Dieu) se voient dotées des mêmes caractères de substantialité, de permanence, de causalité et se trouvent facilement restituées par l'évidence qu'on en a, propos qui s'accorde assez bien avec l'indigence intellectuelle des cercles politiques de toute cette époque.
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Écrit par
- Guillaume de BERTHIER DE SAUVIGNY : professeur à l'Institut catholique de Paris
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