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RUBENS PIERRE PAUL (1577-1640)

Prince de la peinture, « phare » baudelairien, peintre diplomate aux innombrables élèves, aux immenses chantiers, aux multiples voyages, tout de suite connu et à jamais admiré, Rubens semble, par la nature même de son génie débordant, défier l'analyse : le catalogue raisonné de son œuvre, commencé en 1968, est-il même possible ? La distinction entre travaux personnels et ouvrages d'atelier a-t-elle encore un sens ? La célébrité quasi légendaire d'un tel Protée ne laisse pas finalement de lui être nuisible : on connaît peu ses dessins et mal ses débuts, qui se sont enrichis au xxe siècle de quelques importants inédits. Rubens, à cet égard, reste l'un des rares grands maîtres anciens dont réapparaissent encore des œuvres inconnues : le fait mérite d'être relevé qui prouve avec éclat le caractère étonnamment vaste, divers et polymorphe de ce génie de la peinture. Resterait enfin à situer cet humaniste peintre : comme le dernier « grand » de la Renaissance ou comme le premier baroque moderne, libérateur malgré lui de tous les individualismes picturaux qui suivirent – ou peut-être bien les deux à la fois –, grand dans la perfection même de son traditionalisme culturel ou dans l'exaltation quasi préromantique des formes et des couleurs, admirable dans le feu de l'esquisse ou se réalisant plus authentiquement dans la grande « machine » pompeuse et théâtrale qui ennuie dès l'abord nos capricieux et injustes contemporains ? Rubens, en fait, ne lassera jamais les interrogations et les perplexités : génie rassurant, lyrique aimable, puissant décorateur, Rubens invite à une analyse très souple et très ouverte, où la vérité procède de l'accumulation même des points de vue et du jeu profond des contradictions apparentes.

Les premiers maîtres et le séjour italien

Rubens, le plus «  flamand » de tous les peintres des Pays-Bas (avec Bruegel l'Ancien), est pourtant né en Allemagne, à Siegen (Westphalie), par suite des vicissitudes de l'histoire. Son père, Jan, jurisconsulte considéré, échevin d'Anvers à trente-deux ans (en 1562), avait dû fuir en 1568 les Pays-Bas à cause des troubles politico-religieux et de ses propres sympathies pour la Réforme et s'était établi à Cologne. Accusé d'adultère avec Anne de Saxe, la femme de Guillaume le Taciturne dont il était devenu le conseiller juridique, il avait été emprisonné pendant deux ans à Dillenburg, puis exilé à Siegen de 1573 à 1578. Peu après la naissance d'un sixième enfant, Pierre Paul (le futur peintre), le ménage revint s'établir à Cologne, où le père mourut en 1587. Au début de 1589, la mère de Rubens regagna Anvers. Les bonnes études humanistes qu'il commença à l'école latine de Rombaut Verdonck, et dont il sut d'ailleurs garder le souvenir, furent bientôt écourtées par le manque de ressources auquel devait faire face la veuve de Jan Rubens ; vers la fin de 1590, le jeune Pierre Paul devenait page chez la comtesse Philippe de Lalaing à Oudenarde. Puis, la vocation artistique de l'enfant s'affirmant, il entre en apprentissage chez Tobias Verhaecht, paysagiste proche de Josse de Momper et apparenté à la famille Rubens, pour passer ensuite chez deux peintres d'histoire assez connus à Anvers dans le milieu des « romanistes » alors très actifs : Adam van Noort et surtout Otto Venius. On ne connaît pas la durée exacte de cet apprentissage (quatre ans chez chacun selon Roger de Piles qui recourt ici à une précieuse Vie de Rubens écrite en 1676 par le neveu du peintre, Philippe Rubens) ; toutefois, elle n'a pas pu dépasser sept à huit ans, car on trouve Rubens inscrit en 1598, à vingt et un ans, à la Guilde de Saint-Luc à Anvers. En 1600, il part pour l'Italie comme l'avaient fait son père et son maître Venius (son frère Philippe s'y trouvait déjà).[...]

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Écrit par

  • : conservateur des Musées nationaux, service d'études et de documentation, département des Peintures, musée du Louvre

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<it>Henri IV reçoit le portrait de la reine et se laisse désarmer par l'amour</it>, P. P. Rubens - crédits :  Bridgeman Images

Henri IV reçoit le portrait de la reine et se laisse désarmer par l'amour, P. P. Rubens

L'archiduc Ferdinand, P.P. Rubens - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

L'archiduc Ferdinand, P.P. Rubens

Adoration des Mages, P. P. Rubens - crédits : Musée des Beaux-Arts, Lyon

Adoration des Mages, P. P. Rubens

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