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PIERRE saint (mort en 64)

Le problème théologique

Selon les Évangiles, Jésus adresse cinq paroles à Simon Barjona : « Désormais tu seras pêcheur d'hommes » (Luc, v, 10) ; « Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux » (Matth., xvi, 19 a) ; « Ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux » (Matth., xvi, 19 b) ; « Affermis tes frères » (Luc, xxii, 32) ; « Pais mes agneaux » (Jean, xxi, 15 sqq.).

Tous les mandats confiés par Jésus à Simon ne sont pas essentiellement liés à la personne de Simon. Ils doivent être remplis aujourd'hui encore, bien que le Nouveau Testament ne parle jamais de successeurs. Reste à savoir dans quelle mesure les fonctions particulières de Pierre changent de signification lorsqu'elles ne sont plus exercées par le prince des Apôtres lui-même, mais par un ou plusieurs autres apôtres, voire des non-apôtres. Un problème est posé par l'interprétation du terme de « Rocher » en Matthieu, xvi, 18. Presque tous les exégètes non catholiques interprètent ce texte en s'inspirant de passages comme Éphésiens, ii, 20 et Apocalypse, xxi, 14, selon lesquels l'Église est édifiée sur le fondement des Apôtres. L'office du Rocher serait donc une fonction unique, réservée aux seuls Apôtres. Plusieurs commentateurs appartenant à l'Église romaine comprennent toutefois le verset Matthieu, xvi, 18 à la lumière du verset 19, qui le suit et qui l'explicite. Si cette interprétation était avérée, l'office du Rocher ne se limiterait pas nécessairement aux Apôtres. Comme on ne voit pas clairement de quelles fonctions précises Simon est revêtu en tant qu'apôtre, il faut admettre à titre hypothétique qu'il y a succession pour toutes les composantes de l'office de Pierre. Mais alors se pose la question suivante : qui succède à Barjona ?

En premier lieu, ce sont tous les chrétiens qui sont chargés de l'office de Pierre. Les évangélistes surtout insistent – chacun à sa propre manière – sur la signification exemplaire de Pierre comme premier croyant et prototype de tous les chrétiens à toutes les époques. Mais, en outre, c'est l'Église dans sa totalité qui reçoit la mission de pêcher, d'ouvrir et de fermer, de lier et de délier, d'affermir et de paître. Cependant, il ne fait pas de doute que le Nouveau Testament connaît aussi un ministère de Pierre plus restreint et plus spécifique, réservé à un seul groupe.

Dans le dialogue œcuménique qui se déroule actuellement entre les Églises chrétiennes, la question décisive est celle de savoir s'il existe un ministère qui appartienne exclusivement à un successeur de Pierre sous un mode individuel ? À la lumière du Nouveau Testament, la limitation du ministère de Pierre à une seule personne représente une possibilité parmi d'autres. Du point de vue sociologique, il faudrait accorder la préférence à celle des organisations et des structures qui garantirait le mieux la soumission de l'autorité ecclésiastique à la critique et au contrôle de l'« Évangile », de cet Évangile auquel Paul et Pierre étaient eux-mêmes soumis (Gal., ii, 14). Dans la perspective protestante, le fait que l'Église primitive ait été dirigée pendant un certain temps par un seul homme ne saurait plus avoir pour l'époque actuelle qu'une portée typique ou exemplaire. Ainsi Oscar Cullmann parle-t-il du rôle de Pierre aux débuts de l'Église comme d'un « modèle » pour le temps présent.

Sous quelque forme qu'il se concrétise, le ministère de Pierre doit s'accomplir dans l'annonce du témoignage apostolique. Tous les détenteurs de ce ministère après Simon doivent se référer à l'apôtre-rocher, car aujourd'hui il peut certes y avoir un Pierre, mais pas de Simon.

— Félix CHRIST[...]

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