MONDRIAN PIET (1872-1944)
Le néo-plasticisme
Le principe du néo-plasticisme, que Mondrian nomme aussi « principe général de l'équivalence plastique », est une manière de dialectique imitée grossièrement de Hegel qui ne concerne pas seulement les arts plastiques ni même les seuls arts, mais toutes les activités de l'homme, ses productions culturelles, sa vie sociale et même sexuelle. C'est un dualisme dont le but est de dissoudre toute particularité, tout centre, toute hiérarchie : toute harmonie qui n'est pas double, constituée par une « opposition équivalente », n'est qu'apparence. Tout ce qui n'est pas « déterminé par son contraire » est « vague », « individuel », « tragique ». Au rejet de la grille fait suite un certain retour à ce qu'on pourrait nommer une forme de composition traditionnelle (équilibrage des éléments picturaux dans un tout non hiérarchique). Les textes de Mondrian à cette époque parlent de repos universel, de balance absolue, et rêvent d'une société future, parfaitement équilibrée, où chaque élément sera « déterminé ». On peut en sourire aujourd'hui, mais ces textes font comprendre pourquoi Mondrian se crut obligé d'élaborer toute une utopie architecturale (prédisant la fin de l'art dans l'architecture-en-tant-qu'environnement) : dans sa lutte contre le « particulier », Mondrian ne peut que souhaiter la fusion généralisée (de la toile avec l'intérieur de la maison qu'il faudra lui aussi considérer comme une forme d'« art », c'est-à-dire comme un tout abstrait non hiérarchisé, de l'intérieur avec la maison tout entière, de celle-ci avec la rue, de la rue avec la ville, etc.). Chacune des toiles néo-plastiques de Mondrian est considérée par lui comme un « substitut de l'ensemble », comme un modèle théorique et microcosmique d'un macrocosme à venir. La peinture a été réduite à un ensemble d'éléments incompressibles, « universels » (les plans de couleur primaire qui s'opposent aux plans de non-couleur – gris, noir, blanc ; les lignes verticales qui s'opposent aux lignes horizontales tout en arraisonnant les divers plans qu'elles délimitent à la surface de la toile), et ces éléments sont indéfiniment combinés en totalités indépendantes devenues le chiffre d'un univers d'où tout mouvement a été banni.
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Écrit par
- Yve-Alain BOIS : professeur d'histoire de l'art à l'université Harvard
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