POMPONAZZI PIETRO (1462-1525)
Philosophe italien, Pietro Pomponazzi eut une grande influence sur le courant de pensée rationaliste de la Renaissance.
Après avoir fait ses études de médecine à Padoue, il enseigna la philosophie dans cette ville pendant une vingtaine d'années (1488-1509), puis passa à l'université de Ferrare et à celle de Bologne, où il séjourna jusqu'à sa mort.
Dans son ouvrage le plus important, De immortalitate animae (1516), partant de la conception aristotélicienne de l'âme comme forme ou acte du corps biologique et s'opposant au courant averroïste christianisé qui posait l'immortalité de l'intellect actif, le penseur mantouan considère, en s'inspirant des thèses d'Alexandre d'Aphrodise, que l'âme, tout en étant une faculté incorporelle de réflexion et de compréhension, est inséparable du corps et mortelle comme lui. Il affirme que ce « dogme » de l'immortalité est d'opportunité. C'est « le régulateur qui, connaissant le penchant de l'homme au mal et ayant égard au bien commun, a décidé que l'âme était immortelle non par souci de la vérité, mais de l'honnêteté, et pour amener les hommes à la vertu ». Cette négation d'un dogme religieux fondamental provoqua la réaction de l'Église : l'ouvrage fut brûlé solennellement à Venise et des polémiques s'ensuivirent, notamment avec Contarini et Nifo, chargé par Léon X de réfuter Pomponazzi. Celui-ci, par esprit de conciliation et par prudence, répliqua en acceptant la théorie averroïste de la double vérité : celle de la raison, valable sur le plan philosophique, et celle de la foi, valable sur le plan religieux. En fait, ses ouvrages consacraient la rupture entre la science et la foi, la raison et l'autorité. Il en résulte que, la vie morale devenant immanente et autonome, les actions humaines trouvent en soi leur propre sanction, récompense ou châtiment.
Dans ses autres traités et cours universitaires, Pietro Pomponazzi nie le caractère surnaturel des miracles et des prodiges, montrant que ces phénomènes, fruits de l'imagination ou de l'espoir, entrent dans l'ordre naturel de l'univers, dont le plus grand miracle est sa propre perfection que l'homme est loin de connaître, ignorant qu'il est des forces occultes, des influences à distance, du pouvoir de l'imagination capable d'opérer, par suggestion, de véritables guérisons (De naturalium effectuum admirandorum causis seu de incantationibus liber, 1556). Il s'en prend par ailleurs à la thèse de l'arbitraire de l'intervention divine, ramenant la toute-puissance de Dieu à la loi universelle de la nature et défendant une théodicée de type stoïcien (De fato, libero arbitrio et de praedestinatione, 1520).
Pomponazzi est le penseur aristotélicien le plus novateur de son siècle, qui recueille les fruits d'une longue tradition d'examen critique issue des courants de pensée rationalistes du Moyen Âge et de l'humanisme. Ses thèses matérialistes provoquèrent une très vive polémique et eurent une influence durable jusqu'au xviie siècle. Elles témoignent des mutations de la pensée et des méthodes philosophiques, qui s'orientent, au cours de la Renaissance, vers une recherche rationnelle de la vérité.
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Écrit par
- Adelin Charles FIORATO : professeur à l'université de Paris-Sorbonne
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Autres références
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LIBERTINS
- Écrit par Robert ABIRACHED et Antoine ADAM
- 5 715 mots
...(1550 env.-1631). Il apprit, dans des entretiens privés, ce que cachait l'aristotélisme que Cremonini enseignait dans ses cours. On connaissait aussi Pietro Pomponazzi (1462-1525), qui enseignait la « mortalité » de l'âme. On avait vu en France, à Paris et à Toulouse, Lucilio Vanini (1585-1619),...