- 1. Une plasticité cérébrale évidente
- 2. Les cartes cérébrales éclipsent la plasticité
- 3. Des preuves à l’appui de la plasticité cérébrale
- 4. Hypothèses et mécanismes de la plasticité cérébrale
- 5. La ou les plasticités ?
- 6. L’exploration de la plasticité cérébrale : perspectives médicales
- 7. Perspectives éducatives
- 8. Bibliographie
PLASTICITÉ CÉRÉBRALE
Les cartes cérébrales éclipsent la plasticité
Les travaux physiologiques du Canadien Wilder Graves Penfield (1891-1976) représentent un nouvel élan pour la localisation corticale des fonctions. En 1937, celui-ci propose en effet des dessins de « cartes » sensorimotrices grâce à la stimulation électrique systématique sur cerveaux à découvert à l'état de veille chez les épileptiques. Pour les « localisateurs » comme Penfield, l'établissement systématique de telles cartes n'était qu'une question de temps et leur labilité éventuellement observée ne pouvait être considérée que comme épiphénomène.
En revanche, la plasticité est mise en exergue par ceux qui critiquent la spécificité des territoires neuraux, comme le neuro-anatomiste Karl Lashley (1890-1958). Se fondant sur des expériences de lésions cérébrales chez le rat, Lashley réfute sévèrement toute théorie du système nerveux en tant qu'addition de centres discrets dont chacun aurait une fonction unique, de telle sorte que la destruction d'un ensemble de cellules provoquerait la perte d'une fonction et la conservation de toutes les autres. Il développe le principe de l'équipotentialité, c'est-à-dire de la capacité de toute zone fonctionnelle à prendre en charge un comportement spécifique. Ainsi, la faculté d'apprentissage d'un rat dans un labyrinthe ne dépendrait pas de la zone où l’on a préalablement opéré une ablation de tissu cortical, mais de la quantité de celui-ci. Selon cette théorie, toute aire corticale intacte peut donc exécuter les fonctions des autres parties du cortex, bien qu'il en résulte habituellement une certaine perte d'efficacité.
Mais l'accumulation de données concernant la mise en évidence d'étroites spécialisations corticales au niveau sensoriel viendra discréditer cette notion d'équivalence fonctionnelle et détournera pour un moment l'attention de la plasticité cérébrale.
L'étude de l'organisation fonctionnelle de l'appareil visuel était déjà fort avancée dans le milieu des années 1950 au niveau rétinien, avec les travaux de Stephen Kuffler, de Ragnar Arthur Granit, et de Gunnar Svaetichin. Cependant, c'est le cortex cérébral qui verra les découvertes les plus spectaculaires lorsque sera montrée l'étroite spécificité du cortex visuel et de son organisation par David H. Hubel et Torsten N. Wiesel (Prix Nobel de physiologie ou médecine 1981, avec Roger W. Sperry). Ces deux chercheurs entreprennent en effet de passer celui-ci au peigne fin, grâce à des microélectrodes, pour en déterminer les propriétés fonctionnelles. Ce cortex se révélera constitué de colonnes de neurones fonctionnellement identiques, mais préférentiellement activés, dans toutes les couches, par un œil ou par l'autre ─ la réponse variant de la dominance complète d'un œil à une égalité des influences entre les deux yeux. Les résultats obtenus sur l'organisation et l'architecture fonctionnelles du cortex cérébral du singe et du chat seront dès lors étendus à la plupart des autres espèces animales, y compris à l'homme.
En 1957, l'Américain Vernon Mountcastle découvre, dans le cortex sensoriel somesthésique, les colonnes constituées de neurones qui réagissent de façon sélective selon la région corporelle stimulée ou en fonction du type de stimulus. Le cortex auditif est lui aussi exploré entre 1950 et 1960 par différents groupes. On met ainsi en évidence que chaque neurone du cortex acoustique réagit de façon sélective à des sons de fréquences différentes, avec une décharge maximale pour une « fréquence préférentielle ». Cette sélectivité s'affirme en allant des récepteurs jusqu'au cortex acoustique, via les structures sous-corticales.
Toutefois, les travaux de Penfield sur les cartes cérébrales[...]
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Écrit par
- Jean-Claude DUPONT : professeur des Universités (histoire et philosophie des sciences) à l'université de Picardie Jules Verne, Amiens
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