PLOÏDIE
Allopolyploïdie et rôle de la polyploïdie dans l'évolution
L'installation de l'état polyploïde est l'un des processus qui, au cours de l'évolution, a donné naissance à de nouvelles espèces. Il apparaît clairement que ce processus est intervenu fréquemment dans l'histoire récente des plantes vasculaires, surtout sous la forme de la production d'allopolyploïdes.
Par rapport aux autopolyploïdes, qui correspondent à ceux qui tirent origine d'une espèce unique, on qualifie d'allopolyploïdes les polyploïdes qui dérivent d'hybrides entre espèces voisines. Dans le règne végétal, ces hybrides, lorsque leur garniture chromosomique ne contient que les lots haploïdes des deux espèces parentes, sont souvent viables et même vigoureux, mais restent stériles, parce que les chromosomes des deux espèces ne réussissent pas à s'apparier au moment de la méiose. Le doublement du nombre des chromosomes donne alors naissance à un allotétraploïde, dans lequel les chromosomes existent par paires régulières d'éléments homologues. L'allotétraploïde est fertile et génétiquement stable.
Il est actuellement facile de provoquer la formation aussi bien d'autopolyploïdes que d'allopolyploïdes et c'est là l'origine de bon nombre de plantes horticoles d'obtention récente. Des espèces cultivées très anciennes sont également polyploïdes. La plus importante est le blé panifiable, Triticum sativum, qui est un allohexaploïde, dont les quarante-deux chromosomes représentent la juxtaposition de trois garnitures diploïdes de quatorze, qui dérivent de trois espèces différentes de Graminées. Le blé n'existe pas à l'état sauvage, mais son apparition remonte aux tout premiers temps de l'agriculture.
Lorsque l'on compare les garnitures chromosomiques d'un groupe d'espèces sauvages voisines – celles, par exemple, que l'on rassemble dans un même genre –, on s'aperçoit fréquemment qu'elles forment ce que l'on appelle un complexe polyploïde. Dans le groupe on rencontre, en effet, tout d'abord une ou plusieurs espèces dont le nombre haploïde présente une certaine valeur minimale de base ; elle est par exemple de sept chez les Graminées rattachées aux Céréales et a été conservée chez le seigle, parmi les espèces cultivées. Les autres espèces du groupe ont un nombre haploïde qui est un multiple de ce nombre de base, et sont donc manifestement des polyploïdes.
Les cas d'installation récente de l'état polyploïde sont, par contre, assez rares dans le règne animal. Les plus connus s'observent dans les espèces qui se reproduisent par parthénogenèse obligatoire et dans lesquelles, par conséquent, les mâles ont disparu et la méiose est devenue anormale. L'exemple classique est le Crustacé Branchiopode Artemia salina, dont il existe à la fois des races diploïdes et des races polyploïdes qui ont des habitats géographiques différents.
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Écrit par
- Philippe L'HÉRITIER : professeur honoraire à la faculté des sciences de Clermont-Ferrand
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