POINÇONS, métaux précieux
Les premiers témoignages que l'on trouve en France d'une empreinte appelée poinçon datent du xiiie siècle ; ils attestent une reconnaissance de titre légal dans l'usage du métal précieux employé, or ou argent. Au cours du siècle suivant les documents laissent penser que, parallèlement, un autre poinçon, signature de l'orfèvre ou poinçon de maître, pouvait être apposé ; il deviendra obligatoire plus tard. Il existe dès lors deux catégories de poinçons : le poinçon-signature de l'artisan orfèvre, et le poinçon de contrôle attestant non seulement de l'usage d'un métal au bon titre, mais aussi du paiement d'une taxe ou impôt sur le poids de métal utilisé.
Les premiers poinçons de contrôle furent appelés poinçons de ville ou de communauté, et réglementés pour la communauté d'orfèvres parisiens par le prévôt de Paris, Étienne Boileau, vers 1260 ; saint Éloi en fut le patron. Le poinçon de ville reproduit en général les armes de la ville ou une sorte de rébus à partir de son nom : une tour pour la ville de Tours, les clés des armes d'Angers, ou un rat passant pour Arras. Certains poinçons reproduisent des lettres du nom de la ville, « M.O.P. » pour Montpellier. Ce poinçon était apposé par le garde de la communauté élu dans chaque communauté d'orfèvres de chaque ville. En 1355, le roi Jean le Bon introduit des modifications dans les statuts. Le poinçon de ville sera désormais accompagné d'une marque pour chaque orfèvre, représentant selon le choix de chacun une devise ou une lettre accompagnant un symbole : à Paris la fleur de lys couronnée est invariable ; en province rien n'est particulièrement fixé, mais la fleur de lys ou la couronne sont assez souvent employées, les orfèvres voulant imiter leurs collègues parisiens.
Les plus anciens poinçons de maître connus remontent aux années 1340-1350, à Paris comme en province. Certaines pièces du Trésor de Coeffort conservé dans la cathédrale du Mans comportent des poinçons provinciaux très lisibles à initiales et fleurs de lys, que l'on peut dater des dernières décennies du xive siècle. Le poinçon de maître était gravé, déposé et insculpé dans chaque chambre de la Monnaie. En 1493, une ordonnance autorise les orfèvres de Paris à ajouter dans leur poinçon deux grains, dits « grains de remède » ou « de tolérance » de part et d'autre de la fleur de lys qui est elle-même surmontée d'une couronne, pour les distinguer des orfèvres de province.
À partir de 1506, le poinçon de communauté prend le relais des poinçons de ville et doit changer avec chaque garde, c'est-à-dire tous les ans. Il est constitué d'une lettre de l'alphabet couronnée ou lettre-date utilisée à cheval sur deux ans. Jusqu'en 1621, on utilisa l'alphabet gothique, puis ce fut l'alphabet romain. En 1784 et jusqu'en 1789, date de la suppression des corporations, la lettre-date fut remplacée par un P surmonté des deux derniers chiffres du millésime.
À côté de ce poinçon se trouvent, à partir de la fin du xviie siècle, un poinçon de charge et un autre dit de décharge. En effet, dès 1579, le roi Henri IV décida de taxer d'un impôt les ouvrages d'orfèvrerie, impôt appelé à l'époque « droit de remède », parce qu'il devait en principe mettre le prix des ouvrages d'or et d'argent en harmonie avec la valeur officielle et conventionnelle des monnaies. Le règlement n'était pas strictement respecté mais en 1672 Louis XIV rendit obligatoire cet impôt en doublant les droits. L'orfèvre devait apporter la pièce ébauchée ou en cours de fabrication, au fermier en présence duquel le garde apposait le poinçon de charge ou poinçon de fermier rendu définitivement obligatoire en 1697, poinçon qui garantissait le bon titre du métal. L'acquittement définitif[...]
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Écrit par
- Catherine ARMINJON : conservateur de l'Inventaire, responsable des Objets mobiliers à l'Inventaire général
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