POITOU
Ancienne province française dont l'essentiel a formé les départements de la Vendée, des Deux-Sèvres et de la Vienne. Riche comme tout l'Ouest en mégalithes et en gisements de l'âge du bronze, le Poitou entre dans l'histoire comme territoire des Pictones, d'où son nom. À l'époque romaine, il fut l'une des cités d'Aquitaine. D'importants vestiges témoignent d'une profonde romanisation. Celle-ci rayonna à partir de l'ancien oppidum qui commandait le seuil : Limonum (Poitiers), devenu centre routier et administratif. Extrême avancée des pays du Sud sur une grande voie de passage, le Poitou deviendra au Moyen Âge le champ de batailles décisives (Vouillé, 507 ; Poitiers, 732 et 1356), le lieu de rencontre privilégié entre les cultures du Nord et du Midi. Un autre trait durable sera la vigueur de la christianisation, illustrée par de nombreux saints et la fortune de la vie monastique : ainsi au ive siècle l'évêque Hilaire et son disciple Martin, fondateur de Noirmoutier et de Ligugé ; au vie siècle la reine Radegonde, fondatrice de Sainte-Croix. Le comté mérovingien sera un véritable séminaire d'évêques.
L'âge d'or du Poitou se situe aux xie et xiie siècles, après la tourmente normande. Les Guilhem, comtes de Poitiers dont l'origine remonte à 839, s'imposent comme ducs d'Aquitaine à partir de 928 pour deux siècles. Bien que leur autorité ne soit vraiment reconnue que dans le Poitou, ce titre ducal est riche de possibilités. Ne se font-ils pas couronner, comme des rois, à Saint-Martial de Limoges ? Mais, en 1137, la dynastie tombe en quenouille. On sait comment Aliénor apporta sa dot au roi de France Louis VII, puis à Henri Plantagenêt en 1152. Certes, cette duchesse énergique et raffinée, célébrée à l'égal de l'« aigle, reine des airs », jeta jusqu'à sa mort (1204) un dernier éclat sur sa maison. Trouvères et troubadours hantaient sa cour et de nombreuses chartes de libertés communales furent alors rédigées. Il n'en reste pas moins que le Poitou était désormais intégré à un plus vaste ensemble.
Ces deux siècles sont aussi ceux de la grande époque romane poitevine. Elle correspond à l'intense renouveau de la vie religieuse, marqué avec éclat par les proclamations de paix de Dieu (dès 989) et de croisade (1096) à Charroux et à Poitiers, ainsi que par la fondation de Fontevrault (1101), cependant que d'obscures foules de pèlerins cheminent sur la grand-route menant à Saint-Jacques et que se multiplient monastères et prieurés. Les moines certes, mais parfois aussi de grands féodaux et des villes en plein essor, ont créé une riche floraison d'églises romanes : Saint-Hilaire et Notre-Dame-la-Grande de Poitiers, Chauvigny, Saint-Savin, Saint-Jouin, Aulnay, etc. Leur variété n'exclut pas les caractères d'un style régional : relative fréquence du déambulatoire et de la nef à collatéraux, médiocrité de l'élévation, clochers parfois coiffés d'un cône de pierre à écailles, et surtout exubérance du décor sculpté qui envahit parfois toute la façade, divisée en arcatures aveugles, et utilise aussi bien des thèmes orientaux (la faune) que des thèmes sacrés ou des scènes de la vie quotidienne. La peinture murale est aussi très riche (Saint-Savin). Cette période se termine avec la pénétration de l'art gothique, favorisée par les Plantagenêts puis par la domination capétienne.
En effet, le Poitou, occupé dès 1204 par Philippe Auguste, échut bientôt en apanage à un frère de Saint Louis, Alphonse. Celui-ci y introduisit une bonne administration, cependant qu'après l'échec de la révolte de Lusignan (1241-1242) le roi d'Angleterre renonçait à ses droits (1259). Avant-garde de l'Aquitaine, le Poitou jouera un rôle essentiel pendant la guerre de Cent Ans.[...]
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Écrit par
- Gabriel LLOBET : docteur de troisième cycle, professeur au lycée Léonard-Limosin, Limoges
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