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POLICE EN FRANCE DE LA LIBÉRATION À NOS JOURS

Les tentatives d’adaptation de l’appareil policier français

À partir du milieu des années 1970, avec l’arrivée au pouvoir de Valéry Giscard d’Estaing, et plus encore, celle de François Mitterrand en 1981, c’est davantage le souci de l’adaptation de l’institution et de ses modes d’intervention à la problématique émergente de l’insécurité qui domine, et ce jusqu’à nos jours. Les questions du maintien de l’ordre et de la police politique ne disparaissent pas, mais elles changent d’objet : des mouvements sociaux aux émeutes urbaines, pour le maintien de l’ordre ; de la lutte contre le gauchisme à la lutte contre les terrorismes, pour la police politique.

La police judiciaire

Les changements sont cependant plus sensibles en ce qui concerne les structures et l’architecture d’ensemble de l’appareil policier que pour ce qui est des pratiques. Certes, à la suite d’affaires criminelles retentissantes (les affaires Gregory Villemin ou Thierry Paulin, au milieu des années 1980, les affaires Omar Raddad et Guy Georges dans les années 1990), qui ont démontré l’insuffisance du dispositif et la perte de compétence des agents, on a assisté, à partir du milieu des années 1980, à une certaine renaissance de la police technique et scientifique, longtemps la belle endormie de la police judiciaire : création en 1985 d’une sous-direction spécifique, réorganisation des laboratoires, recrutements massifs de spécialistes de l’identité judiciaire et formation de plusieurs milliers de policiers, informatisation des fichiers dactyloscopiques en 1987, création du fichier des empreintes génétiques en 1994. La mise en place de ces nouveaux instruments a cependant été assez lente et chaotique, et leur utilisation, si elle a indéniablement facilité le travail des enquêteurs, joue un rôle moins décisif dans la réalité que dans les fictions télévisuelles.

Le maintien de l’ordre et la sécurité publique

Dans le domaine du maintien de l’ordre, il a fallu s’adapter aux nouvelles conditions d’intervention suscitées par les émeutes urbaines devenues récurrentes depuis le début des années 1980. On est ainsi passé d’un maintien de l’ordre essentiellement défensif, fondé sur des unités importantes, axé sur le contrôle à distance des manifestants et la planification de l’événement, voire sa cogestion avec les organisateurs, à un modèle beaucoup plus souple, en petites unités plus adaptées, pour contrôler des émeutiers très mobiles et procéder à des interpellations, dotées d’une batterie diversifiée d’armes dites non létales (Flash-Ball, pistolet électrique, grenades de désencerclement, etc.) et appuyées par des hélicoptères équipés de projecteurs.

En matière de sécurité publique, c’est la police de proximité, mise en place à la fin des années 1990, mais rapidement avortée, qui constitue la tentative la plus ambitieuse de réforme des principes et des pratiques. Elle visait à donner aux attentes et aux besoins des populations locales le primat sur les directives venues du sommet de l’appareil, afin de rapprocher la police de la population, objectif dont la nécessité avait été perçue dès le milieu des années 1970. Avant d’être brutalement interrompue en 2003, cette tentative s’était heurtée à de nombreuses difficultés, dont les principales tiennent à la résistance des personnels et à l’incapacité du ministère de l’Intérieur à piloter une réforme d’une telle envergure dans un calendrier trop contraint par des impératifs électoraux. En outre, les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis prirent, en quelque sorte, la politique de proximité à contre-pied ; alors que celle-ci visait principalement la petite et moyenne délinquance quotidienne, c’est le terrorisme qui revenait spectaculairement sur le devant de la scène, redéfinissant l’agenda de la politique de sécurité et permettant[...]

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Écrit par

  • : directeur de recherche de première classe au C.N.R.S.

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