- 1. L'urgence et le provisoire (1789-1790)
- 2. La refondation de la police par les Assemblées révolutionnaires (1790-1792)
- 3. La Terreur et le retour de la « police générale » (1792-1794)
- 4. Les créations institutionnelles du Directoire (1795-1799)
- 5. La police de Napoléon (1800-1815)
- 6. Bibliographie
POLICE SOUS LA RÉVOLUTION ET L'EMPIRE
Les créations institutionnelles du Directoire (1795-1799)
La chute de Robespierre en juillet 1794, puis la fin du gouvernement révolutionnaire provoquent de nouvelles transformations pour la police. Le personnel policier est une des cibles de la « réaction thermidorienne » de l'an III (septembre 1794). Le contrôle direct de la police par la Convention s'accentue. Le Comité de sûreté générale devient la principale autorité de police. Avec la suppression de la Commune de Paris, la police de la capitale passe sous l'autorité d'une « commission exécutive » nommée par ce Comité, dite Commission des administrations civiles, police et tribunaux. Les quarante-huit comités révolutionnaires sont remplacés par douze comités de surveillance d'arrondissement, également sous sa coupe, qui assurent la police politique.
Cependant, le régime du Directoire est à l'origine d'importantes innovations, marquées par une volonté de clarification, qui tranchent avec la période de la Terreur. Sur le plan conceptuel, la police ne se confond plus avec l'exercice du gouvernement, mais devient un instrument de maintien de l'ordre. La promulgation du Code des délits et des peines (3 brumaire an IV, 25 octobre 1795) est l'aboutissement de la réflexion menée depuis 1789, qu'il synthétise.
Le Directoire crée pour la première fois un ministère de la Police générale (12 nivôse an IV, 2 janvier 1796). Paris n'est plus un modèle à reproduire, mais devient pour la première fois le véritable centre de coordination de l'institution. La capitale est dotée d'une administration policière centralisée, le Bureau central du canton de Paris, dirigé par trois administrateurs et un commissaire du Directoire. Les commissaires de police, rendus obligatoires depuis 1795 dans toutes les villes de plus de cinq mille habitants, ne sont plus élus, mais nommés par le gouvernement, comme les juges de paix.
L'image de la police du Directoire fut longtemps mauvaise, car elle était associée aux provocations contre les opposants politiques, à la valse de ses ministres (neuf en trois ans), et souffrait de la valorisation excessive de la police impériale et de ses « maîtres policiers », le ministre de la Police générale Joseph Fouché et Eugène François Vidocq, un ancien bagnard devenu agent de la police. Cette légende noire masque un changement important des méthodes, lequel combine des modes d'action traditionnels, tels que la pénétration des milieux criminels, les pièges et provocations, l'usage extensif d'informateurs « retournés », et des moyens nouveaux, par exemple le recours systématique aux dossiers accumulés sur les individus dans les registres policiers, ou les passeports dont la gestion est peu à peu centralisée. La police peut désormais s'appuyer sur un personnel professionnalisé et sur une coordination inédite, avant 1789 et même après, entre les forces de police et la justice sur le territoire national. Le Bureau central, dont les services ne cessent de s'étoffer, jouit d'une autonomie et de moyens bien supérieurs à ceux dont disposait le lieutenant-général de police. La police s'illustre dans la répression des opposants au Directoire et de leurs nombreux complots, royalistes ou nostalgiques de l'an II. Elle remporte aussi des succès notables contre les criminels et les bandes de brigands qui écument la région parisienne, comme la bande d'Orgères, dont la répression est mise en scène dans des procès spectaculaires. Le nombre de « grands » crimes diminue après 1796.
Le poids des policiers dans le maintien de l'ordre doit être relativisé, en raison de l'ascendant pris par d'autres institutions. Méfiant vis-à-vis de la garde nationale, jugée peu sûre, le Directoire s'appuie sur la gendarmerie, réformée et étoffée, puis sur l'armée. À partir du coup d'État[...]
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Écrit par
- Vincent DENIS : maître de conférences en histoire moderne à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
Classification
Média