- 1. L'urgence et le provisoire (1789-1790)
- 2. La refondation de la police par les Assemblées révolutionnaires (1790-1792)
- 3. La Terreur et le retour de la « police générale » (1792-1794)
- 4. Les créations institutionnelles du Directoire (1795-1799)
- 5. La police de Napoléon (1800-1815)
- 6. Bibliographie
POLICE SOUS LA RÉVOLUTION ET L'EMPIRE
La police de Napoléon (1800-1815)
On relativise aujourd'hui les innovations de la police à l'époque napoléonienne, tout comme l'image d'une police toute-puissante et omnisciente, créée par les policiers eux-mêmes. La police de Napoléon est en effet une construction évolutive, qui connaît une phase particulièrement instable d'expérimentations de 1799 à 1804, pour s'adapter à la construction impériale et à son expansion en Europe continentale.
Au sommet se trouve toujours le ministère de la Police générale, dont le titulaire Joseph Fouché (nommé en juillet 1799) est maintenu après le coup d'État du 18-Brumaire, jusqu'en 1802 quand la paix d'Amiens signée avec l'Angleterre entraîne la suppression du ministère. La police relèvera désormais du ministère de la Justice. Avec la reprise de la guerre et des complots chouans, l'autonomie excessive prise par les différents responsables policiers (préfecture de police, gendarmerie, police secrète) qui rend nécessaire une coordination, le ministère est rétabli en juillet 1804 avec Fouché à sa tête. Plus tard disgracié, celui-ci est remplacé en 1810 par Anne Jean Marie René Savary, général de la gendarmerie d'élite, tout dévoué à Napoléon, qui conserve son poste jusqu'à la chute de l'Empire.
Fouché réorganise puissamment le ministère pour l'adapter à la réalité impériale. En 1804, le territoire national est divisé en arrondissements de police générale, confiés à des conseillers d'État, sous l'autorité du ministre : l'Ouest, le Nord et l'Est pour Pierre-François Réal ; le Midi pour Joseph Pelet de la Lozère ; enfin Paris, sous la tutelle du préfet de police Louis Nicolas Dubois. Un quatrième arrondissement existe brièvement de 1804 à 1806, finalement partagé entre les deux premiers. Il est recréé en 1809, mais englobant cette fois les départements italiens, et est confié au maître des requêtes Jules Jean-Baptiste Anglès.
Bonaparte crée également la Préfecture de police à Paris en février 1800, laquelle remplace le Bureau central, mais ne s'en distingue que par son responsable unique, le préfet de police, Louis Nicolas Dubois (1800-1810), puis Étienne Pasquier (1810-1814). Le préfet de police a sous ses ordres les quarante-huit commissaires de police et vingt-quatre officiers de paix, ainsi que plusieurs dizaines d'inspecteurs. Une garde municipale soldée de plus de deux mille hommes vient remplacer l'armée pour exercer la force publique.
La police elle-même est une simple « infrastructure », dont l'armature se déploie depuis Paris jusque dans les villes des départements. Outre le réseau des préfets, le premier échelon est formé par les commissaires de police, désormais nommés par le chef de l'État, mais salariés par les municipalités, distribués obligatoirement dans les villes de plus de cinq mille habitants, avec un commissaire supplémentaire par tranche de dix mille habitants. Dans les villes de plus de cent mille habitants (Bordeaux, Marseille, Lyon) existent des commissaires généraux, aux larges attributions (police municipale et police de sûreté). Ces personnages puissants empiètent souvent sur les attributions des maires et en imposent parfois aux préfets auxquels ils sont théoriquement soumis.
Cette couverture s'adapte par la suite à l'extension de l'Empire pour pallier les faiblesses du maillage initial : s'y ajoutent à partir de 1809 dans les grandes villes (Turin, Florence, Amsterdam, Rome, puis Hambourg) des directeurs généraux de police qui représentent le ministre, des commissaires généraux supplémentaires créés dans les ports et certains grands nœuds routiers de l'Empire comme Strasbourg (vingt et un en 1813), et de nombreux commissaires spéciaux.
Derrière cette façade homogène règne en fait une grande diversité[...]
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Écrit par
- Vincent DENIS : maître de conférences en histoire moderne à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
Classification
Média