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POLITIQUE La science politique

Vieille de près de vingt-cinq siècles, la science politique devrait offrir aujourd'hui des traits propres, aisément discernables et définissables, faciles à présenter en termes clairs et précis. Or, il n'en est rien. Si l'introduction, il y a vingt-cinq ans, de la science politique dans l'enseignement universitaire de la plupart des pays d'Europe a marqué « la fin d'une extraordinaire carence », elle n'a pas été, comme on aurait pu le penser, la fin des controverses.

Déclarée « introuvable », considérée comme une innovation, voire tenue pour une découverte, la science politique, devenue « la science à la mode », a vu son objet propre discuté et même nié ; d'autre part, sa nature « scientifique » a été admise dans la seule mesure où elle se montrait susceptible d'être une connaissance empirique et positive.

Après un quart de siècle, en dépit de leurs prémisses (ou de leurs préjugés), tous ceux qui se sont consacrés à la science politique ont eu à peu près le même champ d'exploration et d'exposition ; cette constatation a présentement apaisé les polémiques, mais la définition de la science politique n'en reste pas moins en débat. Les lignes qui suivent recueilleront les plus retentissants échos de ces affirmations discordantes. On s'efforcera cependant d'en dégager des propositions positives, reflet moins d'une vue personnelle des choses que d'une tradition continuée et confortée. On ne se dissimulera cependant pas que définir, c'est toujours, en quelque manière, s'approprier.

Existence et indépendance de la science politique

Une juxtaposition de sciences diversifiées

Aux yeux de beaucoup, dont l'attitude prolonge celle qui dominait pendant la seconde moitié du xixe siècle et le premier quart du xxe, il n'existe pas une science politique, mais des sciences politiques multiples et distinctes. Politique n'est pas un substantif, mais une épithète, selon les cas, de la philosophie, de l'économie, du droit, de l'histoire, de la géographie, etc.

Si cette dispersion des enseignements politiques est, historiquement, un simple accident pédagogique, elle traduit aussi une orientation délibérée, conséquence logique de vues intellectuelles précises. Selon Francesco Vito, « une science unitaire, entendue comme la somme de branches multiples obéissant chacune à des méthodes diverses de recherche, exclurait, a priori, la possibilité de parvenir à formuler des propositions ayant le caractère de lois scientifiques. Elle peut tout juste aider à décrire les faits dans leur complexité, mais elle s'arrête au seuil de la construction scientifique. » À l'inverse, Vito estimait certaine « la fécondité des contributions qui peuvent être attendues des études politiques, historiques, philosophiques, économiques, lorsque celles-ci sont opportunément tournées vers l'individualisation des problèmes dominants du monde contemporain, convenablement mises à jour par la plus grande réunion possible de matériaux rassemblés selon les procédés de la science d'observation, et soigneusement coordonnées de telle façon qu'aucun aspect de la réalité politique ne demeure inexploré ».

Selon l'axiome que « les sciences progressent dans la mesure où elles se particularisent » (Vito), l'avenir des sciences politiques serait dans leur spécialisation et, par conséquent, dans leur multiplication. Chaque science traitant d'une matière politique tend à engendrer une science distincte. En se diversifiant, elle devient autonome, et abandonne le cadre de la science politique générale. Si bien que plus les sciences politiques progressent, plus la science politique paradoxalement se vide. Elle n'est plus qu'un résidu sans véritable intérêt ou encore qu'un carrefour de routes multiples.

Cette attitude[...]

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Écrit par

  • : sénateur, recteur honoraire, professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris

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