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POLITIQUE Les régimes politiques

Les formes actuelles de gouvernement

Une distinction réaliste des formes de gouvernement doit aujourd'hui prendre pour critère fondamental l'existence ou l'absence d'une opposition jouissant de la faculté de se faire entendre par des procédés constitutionnels. Il est certain, en effet, que toutes les techniques gouvernementales se trouvent affectées par la place accordée à l'opposition et par les procédures selon lesquelles elle peut légalement intervenir. On pourrait se réclamer de ce critère pour établir une séparation entre les gouvernements démocratiques et ceux qui ne le sont pas. Seulement, un tel partage suppose que l'on identifie la démocratie à la possiblité de contestation. Or, en fait, pour des millions d'hommes, il suffit, pour qu'un gouvernement soit démocratique, qu'il procède du peuple ; l'absence d'opposition étant seulement considérée comme une preuve de l'unité de la volonté populaire. Il est donc préférable d'écarter le recours au concept ambivalent de démocratie et de s'attacher à la distinction objective entre pouvoir ouvert et pouvoir clos. Elle est à l'origine des deux grands systèmes gouvernementaux qui se partagent le monde : les gouvernements monocratiques et les gouvernements délibératifs.

Les gouvernements monocratiques

Le gouvernement monocratique est le mode d'exercice du pouvoir clos. Tous les mécanismes constitutionnels sont destinés à servir l'idéologie des hommes qui détiennent le pouvoir. La qualification de monocratique rend compte à la fois de l'unité de cette idéologie et de la puissance que mettent en œuvre les gouvernants. La monocratie est la condamnation de toutes les formes de pluralisme ; on peut distinguer deux types, la monocratie autoritaire et la monocratie populaire.

Dans la monocratie autoritaire, le pouvoir appartient à un chef qui en incarne les fins et qui l'exerce de façon dictatoriale. Toutefois, cette dictature peut, selon la personnalité de celui qui l'impose et le milieu qu'elle régit, donner lieu à des systèmes politiques différents. Il y a le césarisme empirique, qui ne se réclame d'aucune philosophie politico-sociale particulière ; il s'analyse dans une formule simple : celle du chef à poigne qui, par la police ou l'armée, sait se faire obéir. La dictature idéologique est une forme plus affinée, car le chef prétend justifier son autorité par le charisme que lui vaut l'idée qu'il sert. Le Portugal de Salazar et l'Espagne de Franco sont des exemples de ce type de monocratie autoritaire. On distinguera enfin la dictature prolétarienne. Sous-produit du marxisme, elle ne reproduit que de façon rudimentaire la dictature du prolétariat car les classes déshéritées au nom desquelles elle s'exerce sont politiquement non évoluées et ne peuvent se passer du chef qui établit son autorité sur leurs acclamations. L'Égypte de Nasser et certains États d'Afrique noire ont connu ou connaissent encore ce régime.

L'autre forme de monocratie est celle qui est en vigueur dans les pays communistes : c'est la monocratie populaire qui paraît être le seul système de gouvernement compatible avec les principes de la démocratie marxiste. Le pouvoir y réside dans un peuple unifié par la révolution. Ce peuple officiellement souverain n'était encore, dans la Constitution de 1936 (art. 3) que l'assemblée « des travailleurs de la ville et de la campagne ». Avec la doctrine de Khrouchtchev (qui n'a pas été ouvertement reniée sur ce point par les dirigeants actuels), il comprend la totalité des habitants, car l'U.R.S.S. est « l'État du peuple tout entier ». Cette formule indique que la phase de dictature du prolétariat est dépassée et que l'édification de la cité socialiste requiert l'effort de tous. Certes, le rôle du parti n'en est pas amoindri : sa vigilance demeure nécessaire[...]

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Écrit par

  • : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris

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