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POLYEUCTE MARTYR, Pierre Corneille Fiche de lecture

Le pouvoir et la grâce

Par un enchaînement providentiel, dont le mécanisme est déjà figuré dans Cinna, l'empire des Romains jusqu'ici dominé par un Dèce (ou « Décie »), persécuteur de chrétiens, s'oriente vers un pouvoir consacré à Dieu, vers une image de la dynastie monarchique de droit divin, rendue possible par ce moment providentiel que figure la fable de Polyeucte. La geste héroïque, théâtrale et sacrée d'un Arménien aux marges de l'Empire aura permis que le centre du monde, enfin converti, soit touché par la grâce. Là est donc l'utilité et l'honneur du théâtre : faire en sorte, par une combinaison dramaturgique d'éléments parfaitement agencés, que s'engage une réflexion sur la représentation du sacré. Même si des ombres subsistent sur les intentions et les motivations de Sévère et surtout de Félix : des convertis certes, mais des politiques également, à la fois saisis par la logique de leur fonction et même par les inexplicables actions d'un curieux fanatique...

Dans le même temps qu'il construit une tragédie sacrée, Corneille veille à ce qu'elle illustre le miracle du théâtre, qu'il impose comme le genre majeur, à même de rendre visible l'invisible, et de montrer comment, au travers des souffrances, des complexités et des contradictions, les choses et les événements les plus sacrés se constituent.

— Christian BIET

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Écrit par

  • : professeur d'histoire et d'esthétique du théâtre à l'université de Paris-X-Nanterre

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