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POMERIUM

D'après Tite-Live (I, 44), le mot pomerium désignait une bande de terrain, immédiatement contiguë à l'enceinte fortifiée de Rome, sur laquelle « il n'était mystiquement fondé ni d'habiter ni de labourer ». Cette définition fait clairement apparaître le pomerium comme une ligne de démarcation entre deux espaces dont la distinction est bien attestée dans la mentalité romaine : l'espace intérieur à la ville de Rome ou urbain, l'espace extérieur ou rustique. On sait que les circonscriptions territoriales, les tribus, entre lesquelles étaient répartis les citoyens, se divisaient en deux groupes : les quatre tribus urbaines qui occupaient le sol de Rome et les trente et une tribus rustiques qui occupaient le reste, y compris les agglomérations urbaines. La double interdiction d'habiter et de labourer qui définit le pomerium l'excepte de l'un et l'autre de ces espaces.

Il est notable que cette double interdiction soit prononcée au nom du fondement mystique de toutes choses (fas). Aussi bien l'espace urbain, rigoureusement clos, était-il par excellence le siège des fondements religieux de la cité : c'est dans cet espace qu'opéraient les augures, que se prenaient les auspices, qu'était garantie la qualité de citoyen. En l'isolant, le pomerium séparait le cœur religieux de la cité, condition essentielle de son existence, du domaine ouvert où s'exerçaient les activités rurales, marchandes et surtout militaires. Les citoyens n'avaient le droit de prendre les armes qu'en dehors du pomerium, et Mars lui-même, tout dieu qu'il fût, n'était pas reçu dans le domaine sacré de la ville où son activité propre n'aurait su s'exercer.

On discute et on discutera longtemps pour savoir si cette ligne de démarcation se situait à l'intérieur ou à l'extérieur de l'enceinte fortifiée. La réponse ne changerait rien à sa signification. La seule chose sûre est qu'à chaque extension de l'enceinte fortifiée de Rome a correspondu une extension équivalente du pomerium.

— Jean-Paul BRISSON

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