PORPHYRINES
Les porphyrines sont des pigments d'un très grand intérêt biologique. Elles constituent une partie fonctionnellement essentielle de certaines macromolécules protéiniques indispensables aux processus d'oxydation. On retrouve en effet une porphyrine combinée au fer (l'hème) : dans les hémoglobines et les myoglobines, transporteurs d'oxygène atmosphérique ; dans la catalase et les peroxydases, capables de catalyser respectivement le transfert de l'oxygène moléculaire et celui de l'oxygène atomique détachés d'un substrat ; dans les cytochromes, qui fonctionnent dans la chaîne respiratoire intracellulaire comme transporteurs d'électrons. Le groupement prosthétique de la chlorophylle et de la bactériochlorophylle, agents de la photosynthèse, est également une porphyrine renfermant un atome de magnésium. Dans la molécule de la vitamine B12 figure une porphyrine qui contient un atome de cobalt. Une porphyrine combinée au cuivre peut « activer » l'hydrogène et intervenir comme catalyseur dans les réactions d'hydrogénation. L'oxydation du tryptophane en formylcynurénine est sous la dépendance d'une enzyme héminique (porphyrinique), la tryptophane-pyrrolase. On trouve donc les composés porphyriniques, remplissant des fonctions physiologiques fondamentales, dans toutes les cellules vivantes, aussi bien végétales qu'animales. Aussi admet-on en général que les porphyrines constituent les premiers maillons de la chaîne évolutive qui, synthétisés dans des conditions terrestres primitives par voie abiogénétique (non enzymatique) à partir des composés organiques simples, ont rendu possibles la naissance et l'évolution des êtres vivants.
Pour les biochimistes et pour les médecins, le rôle des porphyrines est d'une importance encore plus évidente en pathologie. Une série de maladies, réunies sous le terme porphyries, sont caractérisées par la surproduction des porphyrines libres, non liées à un métal. D'autre part, les troubles métaboliques des porphyrines accompagnent un grand nombre d'affections diverses et leur étude facilite le diagnostic et l'analyse pathogénique de ces dernières. Il en est ainsi en particulier pour l'intoxication par le plomb, dont le dépistage, en médecine du travail, est réalisable grâce au dosage des porphyrines dans les urines.
Les porphyrines
Caractères chimiques
Les porphyrines constituent une vaste famille. Toutes sont des pigments. Toutes présentent à l'état libre et en lumière ultra-violette une magnifique fluorescence rouge, nettement décelable dans une solution de porphyrine allant de 50 à 1 000 millionièmes, ce qui est un caractère analytique précieux.
Toutes les porphyrines sont des dérivés tétrapyrroliques cycliques, dont les formules peuvent être ramenées à celle de la porphine, composé d'abord théorique, puis synthétisé par Hans Fischer. La porphine est formée de la réunion, en cycle fermé, de quatre noyaux de pyrrole, reliés par des ponts méthéniques (=CH—), numérotés par des lettres grecques. Deux des quatre azotes sont porteurs d'un atome d'hydrogène. Les carbones aux sommets (carbones pyrroliques), numérotés de 1 à 8, fixent chacun un atome d'hydrogène (fig. 1).
La structure des diverses porphyrines dérive de celle de la porphine par remplacement des hydrogènes aux sommets par divers groupements fonctionnels. Ces remplacements sont réalisés, pour les porphyrines biologiquement les plus importantes, par quatre variétés de fonctions chimiques : méthyle (—CH3), acétyle (—CH2—COOH), propanoïque (—CH2—CH2—COOH) et vinyle (—CH=CH2). L'introduction de ces groupements fonctionnels dans la molécule de porphine rend plusieurs atomes de carbone de celle-ci asymétriques, d'où l'existence possible de chaque porphyrine sous plusieurs formes isomériques. La nature n'en a[...]
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Écrit par
- Alfred GAJDOS : ancien chef de laboratoire à la faculté de médecine de Paris, directeur honoraire à l'École pratique des hautes études
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