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PORTO RICO

Un État libre associé aux États-Unis

Les effets pervers d'une extrême dépendance

La crise économique, la crise d'identité et la nature des relations à entretenir avec les États-Unis sont les grands problèmes auxquels Porto Rico est confrontée.

Comme tout pays dépendant, Porto Rico a durement subi les effets de la récession mondiale intervenue à partir du début des années 1970. La politique d'industrialisation fondée sur les exemptions d'impôts, menée à partir du début des années 1950, avait contribué à l'implantation d'industries légères qui pouvaient compter sur une main-d'œuvre à bon marché mais devaient importer leurs matières premières des États-Unis. Parallèlement, l'extension des zones sucrières et l'attrait des emplois en milieu urbain provoquaient la réduction massive des surfaces consacrées aux cultures vivrières, entraînant à leur tour l'importation de denrées alimentaires des États-Unis. Ces industries légères, que les revendications d'augmentation de salaires d'un prolétariat en voie d'organisation rendirent progressivement moins rentables, préférèrent pour beaucoup émigrer vers d'autres sites de la Caraïbe, et elles furent remplacées, à partir de 1965, par les gigantesques investissements des industries pharmaceutiques et pétrochimiques, et par les raffineries de pétrole. Ces industries avaient pour caractéristiques d'être largement automatisées, donc de créer peu d'emplois, et d'être extrêmement polluantes. Porto Rico se trouvait dans la situation d'un pays qui ne consomme pas ce qu'il produit et ne produit pas ce qu'il consomme. À partir de 1975, on assiste à un reflux des industries pétrochimiques, ce qui aggrave la situation de l'emploi et contraint le gouvernement fédéral à introduire les coupons d'alimentation visant à subventionner le chômage et le sous-emploi, et donc à acheter – à un prix élevé pour le contribuable nord-américain – la paix sociale et politique à Porto Rico. On estimait, en 1987, à 8,7 milliards de dollars le montant des transferts de fonds fédéraux.

En 1984 et en 1985, l'Initiative pour le bassin des Caraïbes ( Caribbean Basin Initiative, C.B.I.) et les efforts du président Reagan pour tenter d'équilibrer le budget firent planer la menace d'une importante réduction des fonds fédéraux destinés à Porto Rico. L'administration du P.P.D., dirigée par le gouverneur Rafael Hernández Colón, réussit, dans l'immédiat, à écarter ce danger en associant le gouvernement et le secteur privé de l'île à la C.B.I., sous la forme d'usines jumelées (twin plants) et en expliquant au Congrès et aux dirigeants politiques de Washington que Porto Rico occupait une position exceptionnelle dans les plans stratégiques des États-Unis pour la région caraïbe.

Par ailleurs, la possibilité d'utiliser une partie des 6,8 milliards de dollars déposés dans les banques de Porto Rico, et résultant des exonérations fiscales consenties aux sociétés américaines au titre de la section 936 du Code des impôts des États-Unis, constituait un motif supplémentaire pour que l'île jouât un rôle important dans les projets du président Reagan. L'intention première de l'Administration républicaine avait cependant été d'abroger la section 936, afin de transférer directement aux États-Unis une partie des fonds déposés à Porto Rico, et de contribuer ainsi au rééquilibrage du budget fédéral. Les démarches entreprises par le gouvernement du P.P.D., et appuyées par ses alliés démocrates du Congrès, firent capoter ce projet qui aurait bouleversé l'économie insulaire.

Le P.P.D. resta sans difficulté au pouvoir de 1948 à 1968, date à laquelle des divisions internes lui firent perdre les élections, qui virent la victoire du Nouveau Parti progressiste[...]

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Écrit par

  • : agrégée d'espagnol, professeure de classes préparatoires au lycée Lakanal
  • : agrégé de l'Université, directeur adjoint du département d'études des pays anglophones de l'université de Paris-VIII, collaborateur du Monde diplomatique
  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Paris
  • : professeur d'histoire, université de Porto Rico, ancien secrétaire général de l'Association des universités et instituts de recherche de la région des Caraïbes
  • : professeur à l'université de Porto Rico, doyen de la faculté de sciences sociales
  • : journaliste
  • : professeur d'histoire, Rutgers University, États-Unis
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Médias

Porto Rico [États-Unis] : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

Porto Rico [États-Unis] : carte administrative

Château San Felipe del Morro, Porto Rico - crédits : Bill Wassman/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Château San Felipe del Morro, Porto Rico

Autres références

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    • 23 médias
    ...constituée de matériel volcanique et volcano-sédimentaire d'arc insulaire (zone de Zaza à Cuba, formations Tireo et Los Ranchos à Hispaniola, l'essentiel de l'île dePorto Rico – nappe de Bermeja –, etc.), d'âge néocomien à sénonien (de 125 à 80 Ma), également mise en place au Campanien (80 Ma).
  • CARAÏBES - L'aire des Caraïbes

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    Dansle cas de Porto Rico, Washington conserve la souveraineté sur le pays et octroie la citoyenneté américaine à la population en 1917. Il ne s'agit cependant pas d'un État fédéré mais d'une simple possession : l'île devient, par la Constitution de 1952, un État autonome associé. De même, les États-Unis...
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    ...constituent l'apport essentiel de la littérature missionnaire. Néanmoins, durant l'époque coloniale, la littérature fut loin d'avoir, à Saint-Domingue, Cuba et Porto Rico, l'éclat dont elle brilla au Mexique et au Pérou. Il faut attendre le xixe siècle et le romantisme pour que la littérature caraïbe...
  • MUÑOZ MARÍN LUIS (1898-1980)

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    Après une formation aux États-Unis, où son père est « commissaire résident » de 1910 à 1916, Muñoz Marín étudie le droit, écrit deux livres, puis, en 1926, regagne Porto Rico, où il dirige le journal La Democracia. Élu au Sénat portoricain en 1932, Muñoz Marín aligne sa conduite sur celle...

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