ACHAT POUVOIR D'
Un indice du coût de la vie ?
On présente parfois l'indice des prix à la consommation comme un indice du coût de la vie. L'assimilation dans les esprits n'est pas sans conséquence, notamment dans l'interprétation que se fait le grand public de l'indice des prix, et cela contribue au sentiment de défiance vis-à-vis de l'instrument. D'un côté, comme on l'a signalé, l'indice des prix mesure l'évolution de la dépense d'un individu fictif qui consommerait toujours le même panier de biens. Dans la réalité, ce panier évolue soit par choix, soit parce que des biens apparaissent ou disparaissent. De l'autre, l'indice du coût de la vie est encore à ce jour un objet mythique censé mesuré les « véritables » variations du pouvoir d'achat. De façon un peu allusive, un tel indice pourrait correspondre à une augmentation de revenu permettant à un individu de conserver la même impression d'aisance financière, ou de ne pas se sentir plus contraint financièrement qu'auparavant. La difficulté est toutefois que le concept d'indice du coût de la vie ne fait pas consensus, et que cet indice ne fait pas partie de la panoplie des indicateurs publiés par les instituts de statistique.
La théorie microéconomique prise en défaut
Dans les manuels de microéconomie, la théorie du consommateur fournit une définition de la notion d'indice du coût de la vie. Elle considère un consommateur à deux dates consécutives. Celui-ci choisit son panier de biens selon ses préférences, en fonction des prix et du revenu dont il dispose. À la première date, avec le système de prix en vigueur, et compte tenu de son revenu, il choisit un panier de consommation qui lui procure un certain bien-être. À la date suivante, on admettra que tous les prix ont augmenté, mais de façon différenciée selon les biens ; le nouveau panier de consommation qu'il peut s'acheter avec le même revenu est alors moins garni et lui procure par conséquent une utilité moindre. L'indice du coût de la vie est défini précisément comme la variation de revenu qu'il faudrait lui consentir pour qu'avec le nouveau système de prix, ce consommateur conserve son niveau de satisfaction antérieur.
Cette approche normative est séduisante car elle place le bien-être du consommateur au cœur même de la définition du concept, ce que ne fait pas l'indice des prix à la consommation. Mais elle va se révéler immédiatement insatisfaisante pour répondre à l'accusation selon laquelle l'indice des prix à la consommation sous-estime le coût de la vie telle que les personnes le ressentent. En effet, il est relativement aisé de montrer que, sous les hypothèses habituelles sur les préférences du consommateur, un indice des prix à la consommation voisin de celui publié par la plupart des instituts majore l'indice du coût de la vie ainsi construit. L'argument est simple : l'indice des prix est calculé à partir d'un panier de biens fixé, dont on mesure la valeur aux deux dates. Ce panier de biens correspond à la consommation de l'individu à la première date. De ce fait, l'indice des prix mesure par construction la variation de valeur du panier initial. En indexant le revenu sur l'indice des prix, le consommateur peut toujours s'offrir le panier initial, ce qui lui permet de maintenir son niveau de bien-être, même si les prix ont augmenté. Mais si les prix augmentent de façon différenciée, l'indexation du revenu sur l'indice des prix conduit en général non au maintien mais à l'accroissement du bien-être du consommateur. En effet, à l'ancien panier qu'il peut toujours s'offrir, l'individu va en général en préférer un nouveau moins garni dans les biens qui ont le plus augmenté mais plus fourni dans les biens qui ont augmenté le moins. C'est ce que les économistes appellent « l'effet de substitution ». Or, par construction, si le nouveau panier est préféré à l'ancien,[...]
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Écrit par
- Stéfan LOLLIVIER : directeur des statistiques démographiques et sociales, I.N.S.E.E.
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