Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

PRÉCAIRE

Il faut distinguer la précaire (precaria), qui est l'acte de requête par lequel un vassal demandait à son seigneur de lui faire un don suffisant pour assurer sa subsistance, ou par lequel un homme libre demandait un bienfait en offrant en échange sa fidélité et ses services, du précaire (precarium) qui est précisément le bien fructifère concédé par le puissant à celui qui se place sous sa protection. Ce bien était le plus souvent une terre, mais pouvait aussi consister en un droit (sur un marché ou un péage, par exemple). La vassalité, c'est-à-dire la dédition de soi, étant par nature personnelle et non transmissible puisque librement consentie, le précaire était révocable et limité de toute manière à la vie du donataire. Ce moyen de rémunération des fidélités eut la faveur des grands, et en premier lieu du souverain, à l'époque carolingienne : à pratiquer le don pur et simple, en perpétuelle propriété, les rois mérovingiens s'étaient appauvris et avaient dû finalement subir la loi de leurs anciens fidèles, devenus plus riches qu'eux-mêmes. La pratique du don temporaire, souvent viager, était cependant connue depuis longtemps et tenait en Occident la place de la rémunération en salaire, rendue difficile aux échelons élevés de la société par l'insuffisance de la circulation monétaire. Le système du précaire fut aménagé par Pépin le Bref, qui en fit une véritable institution d'État pour régler la situation des terres d'Église spoliées par son père Charles Martel ; il convenait de rendre ces terres, pour se concilier les clercs, sans les reprendre aux fidèles ou vassaux, dont l'appui militaire et politique était indispensable. Les terres furent donc rendues à l'Église, et les hommes du roi les reçurent à nouveau, en précaire cette fois. On parlait indifféremment de précaire ou de bienfait (beneficium). Ce dernier terme l'emporta dans la pratique dès le viiie siècle. Il fut remplacé, vers le xie siècle, par le mot fief (feodum).

— Jean FAVIER

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : membre de l'Institut, directeur général des Archives de France

Classification