PRÉCOLOMBIENS Méso-Amérique
Les musiques amérindiennes
Les Amériques – la géographie et l'histoire distinguent l'Amérique du Nord, l'Amérique du Sud, l'Amérique centrale et le domaine caraïbe – possèdent une histoire très ancienne. Des recherches anthropologiques ont précisé les origines du peuplement américain par l'Alaska et posé le problème des migrations d'Africains, de Mélanésiens et de Polynésiens. La diversité impressionnante des langues, des traditions culturelles et des civilisations amène la question : existe-t-il un dénominateur commun aux cultures des Amériques ? La musique, répondent les Cubains Alejo Carpentier et Walterio Carbonnell. Qu'on la dénomme folklore, qu'elle ressortisse à la musicologie comparative ou à l' ethnomusicologie, la musique de chacune des cultures américaines a une histoire, une théorie, une esthétique. S'interroger sur ces musiques, c'est se mettre « à l'affût de secrets essentiels », observe l'ethnomusicologue roumain Constantin Brăiloiu (1893-1958), qui a le premier porté des coups décisifs à la perspective européocentriste.
La musique des Amériques comporte trois composantes : un élément endogène, amérindien, des apports africains et des apports européens – essentiellement portugais, espagnols, anglais, néerlandais et français. On a jugé « primitif » le fond amérindien, et les « folkloristes » ont préféré souligner la place prééminente tenue par la musique européenne. Or un primitivisme implique des sociétés arriérées, ce qui est loin d'être l'opinion des historiens et des archéologues qui ont étudié les civilisations précolombiennes. Brăiloiu a fait remarquer, après l'Allemand Carl Stumpf (1848-1936), que les chants amérindiens « supposent une gestion millénaire et se placent, dans le temps, infiniment plus loin d'un état original de la musique que de notre art musical présent ». Quant à la musique africaine, les musicologues ont depuis longtemps montré ses richesses harmoniques, polyphoniques, rythmiques et instrumentales (Joseph H. Kwabena Nketia et Lazarus E. N. Ekwueme).
L'influence européenne s'est exercée, par le biais de la colonisation, à partir du xvie siècle : les éléments portugais au Brésil, l'élément espagnol dans le reste de l'Amérique du Sud, en Amérique centrale et aux Caraïbes, l'élément anglais et néerlandais en Amérique du Nord, l'élément français en Louisiane, au Québec et dans certaines îles. La composante africaine, introduite par la traite des Noirs, s'est répandue dans les territoires qui ont vu se développer le système esclavagiste, du xvie au xixe siècle. On observe sur le terrain, suivant l'évolution des populations, des cas de fusion musicale, des invariants ou des combinaisons parfois difficiles à démêler.
Les instruments
Grâce aux fresques mayas de Bonampak (dans le sud du Yucatán), aux monolithes de San Agustín (Colombie), aux codex et aux témoignages des premiers chroniqueurs de la conquête (Bernardino de Sahagún, Fernández de Oviedo, Tomás de Torquemada), on connaît assez précisément l'ancien orchestre des indigènes. Les ethnomusicologues ont établi l'homogénéité de l'ensemble instrumental dans un espace qui s'étend du Guatemala à la Colombie, au Venezuela et à la région amazonienne. De 1948 à 1950, une mission a étudié particulièrement les musiques maya et karib. Les recherches n'ont fait que confirmer ce qu'on savait déjà implicitement depuis 1920 : on ne devait plus séparer l'archéologie de l'ethnomusicologie des Amériques, l'homme de sa musique et de son histoire.
Sans doute les plus anciens, les instruments à percussion avaient pour fonction rythmique de scander la danse et d'accompagner les chants. Les Maya et les Aztèques semblent avoir employé de nombreuses[...]
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Écrit par
- Rosario ACOSTA NIEVA : docteure en archéologie à l'université Paris I-Panthéon Sorbonne, chercheuse associée Universidad de Guadalajara (Mexique)
- Brigitte FAUGÈRE : maître de conférences à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
- Oruno D. LARA : professeur d'histoire, directeur du Centre de recherches Caraïbes-Amériques
- Éric TALADOIRE : professeur émérite des Universités
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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