PRÉDESTINATION
La prédestination est la doctrine biblique et théologique selon laquelle Dieu choisit d'aimer l'homme, de l'appeler avant son savoir, de le sauver avant ses mérites, de le maintenir dans la fidélité de cet appel et de ce salut avant le terme de sa vie, de condenser ainsi dans un acte de libre amour ce qui se déroule dans la multiplicité variable du temps. La prédestination caractérise Dieu non comme un être immobile et général, mais comme une personne active et élective. Elle protège l'homme contre l'autojustification et l'autoglorification. Elle est certitude sans sécurité. Elle détache du souci de conquérir un salut humainement toujours incertain et elle engage l'homme dans une permanente réponse de gratitude, de tremblement et d'espérance.
La prédestination a toujours constitué un thème important mais difficile pour la théologie chrétienne, car elle paraît s'opposer brutalement à d'autres thèmes de la foi, tels que la liberté humaine, l'universalité du dessein de salut de Dieu, l'importance de l'histoire face à l'éternité, la connaissance de la révélation face à l'incompréhensibilité des voies de Dieu. Séparée de ce que Dieu veut, fait et est en Jésus-Christ, la prédestination risque en effet de se muer en un prédéterminisme qui éloigne Dieu dans le silence de son secret et voue l'homme à la fatalité de son destin, jusqu'à ce que, d'ailleurs, l'homme rejette ce Dieu, devenu à ses yeux symbole d'un arbitraire impénétrable. Pourtant, peu de doctrines théologiques ont eu autant de force créatrice que la prédestination. Il est donc important de connaître pourquoi et comment elle s'est formulée, quels furent les grands débats dogmatiques et pastoraux qui s'instaurèrent autour d'elle, quelle est sa portée centrale, inévitable et féconde aujourd'hui encore, en un temps qui n'est cependant pas celui d'Ésaïe, de Paul, d'Augustin, de Calvin, de Jansénius et de Pascal.
Sources bibliques
Dans l' Ancien Testament, Dieu rappelle sans cesse à son peuple que l'existence de celui-ci dépend d'une élection antérieure à son histoire. Israël ne s'est pas fabriqué son propre Dieu, qui serait alors seulement l'idole de son appétit humain et de sa fierté nationale. Israël a été élu, prédestiné avant sa naissance. La tradition jahviste fait remonter cette élection à l'appel d'Abraham (Gen., xv, 8). La tradition prophétique la lie à l'Exode(Mich., vi, 4). Les traditions deutéronomique et sacerdotale réunissent ces deux origines (Ex., iii, 15). Tous ces textes insistent sur le choix antécédent de Dieu. Il prend l'initiative de l' alliance avec Israël, non pas en vertu d'une qualification particulière, mais pour mettre en évidence avec lui, aux yeux de tous, la gratuité absolue et le caractère de communication personnelle de l'amour électif : « J'ai exaucé ceux qui ne me demandaient rien, je me suis laissé trouver par ceux qui ne me cherchaient pas. J'ai dit : Me voici, me voici ! à une nation qui ne s'appelait pas de mon nom » (Is., lxv, 1). Les prophètes ont éprouvé la réalité de l'élection antécédente, gratuite, particulière et contraignante. Dieu dit à Jérémie : « Avant que je t'eusse formé dans le ventre de ta mère, je te connaissais ; et avant que tu fusses sorti de son sein, je t'avais consacré, je t'avais établi prophète des nations » (Jér., i, 5-6). La prédestination joue ainsi un double rôle : elle évacue la problématique idolâtre de la fabrication des dieux au service des besoins du peuple, simple expression de ses craintes et de ses désirs. Elle atteste aussi que Dieu se communique non dans la généralité, mais dans la particularité, en livrant aux siens son nom propre.
La prédestination[...]
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Écrit par
- André DUMAS
: pasteur, président du journal
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Classification
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