- 1. Prédisposition génétique et cancer
- 2. Prédisposition génétique appliquée aux maladies multifactorielles
- 3. Prédisposition génétique et maladies infectieuses
- 4. Applications à la génétique des populations
- 5. Pharmacogénétique, médecine personnalisée et ouvertures thérapeutiques
- 6. Une arme à double tranchant
- 7. Bibliographie
PRÉDISPOSITION GÉNÉTIQUE ou SUSCEPTIBILITÉ GÉNÉTIQUE AUX MALADIES
Pharmacogénétique, médecine personnalisée et ouvertures thérapeutiques
Il est connu de longue date que la réponse à un médicament varie d’un individu à un autre. Beaucoup de médicaments sont métabolisés par le foie et, pour environ 80 % d’entre eux, notamment par des enzymes appelées cytochromes P450. Il était donc logique de rechercher des variations génétiques modulant l’activité de ces enzymes, et en conséquence modifiant la réponse à un médicament. L’intérêt de ces recherches est ainsi d’identifier un risque accru d’accumulation du médicament et donc de toxicité, ou en revanche une nécessité d’augmenter les doses pour atteindre un seuil d’efficacité. Ainsi, les antagonistes de la vitamine K sont des anticoagulants largement utilisés en pharmacologie et qui, s’ils sont en excès dans l’organisme, entraînent des accidents hémorragiques : il existe des variants alléliques de différents cytochromes CYP2C à l’origine d’une diminution de l’activité de l’enzyme, ce qui augmente donc ce risque d’accident hémorragique. On pourrait multiplier les exemples : l’intolérance musculaire aux statines (médicaments utilisés pour baisser le taux de cholestérol sanguin) est liée à un cytochrome ; la recherche systématique d’un déficit en DPD (dihydropyrimidine déshydrogénase), enzyme qui dégrade certains médicaments anticancéreux, revêt en France, depuis 2018, un caractère obligatoire avant l’administration de toute chimiothérapie contenant des fluoropyrimidines (comme le 5FU) afin d’éviter une toxicité prédictible… On entrevoit donc ici l’ouverture vers une thérapeutique personnalisée, adaptée à la capacité de notre génome à répondre aux médicaments.
L’identification de gènes de prédisposition génétique permettant de mieux comprendre la physiopathologie des maladies n’est pas seulement utile pour prédire la réponse à un traitement, elle peut également aider au développement de nouvelles cibles thérapeutiques. L’asthme, par exemple, qui touche environ 4 millions de personnes en France, est caractérisé par une inflammation des bronches et une difficulté respiratoire exacerbée par l’inhalation d’allergènes. L’inflammation dépend d’une activation des lymphocytes qui produisent en excès de petites molécules pro-inflammatoires, des cytokines. L’asthme peut être très invalidant, notamment lorsqu’il touche le très jeune enfant et qu’il nécessite dès le plus jeune âge la prise récurrente de corticoïdes à fortes doses. Des études de prédisposition génétique ont retrouvé au moins huit gènes liés à l’asthme et, parmi ceux-ci, ceux de deux cytokines (les interleukines-13 et 4) ainsi que celui du récepteur de l’interleukine-4. Ces deux voies sont connues pour réguler la production de mucus bronchique dans le cadre de cette maladie. Il n’est donc pas étonnant de constater que, parmi les traitements de l’asthme sévère, figure un anticorps monoclonal dirigé à la fois contre l’interleukine 4 et l’interleukine 13. Ce type de traitement a révolutionné le quotidien des patients souffrant d’asthme sévère, en permettant notamment de réduire leur besoin en corticoïdes. Nous pouvons également prendre l’exemple du gène de prédisposition à la résistance à l’infection VIH conférée par la mutation du récepteur CCR5, corécepteur du virus du sida. Certains patients porteurs du virus développent des cancers hématologiques (leucémies, lymphomes) justifiant une greffe de moelle. Or, il a été montré que la transplantation de cellules de la moelle osseuse d’individus porteurs de la mutation protectrice du gène CCR5 permettait la rémission de patients porteurs de la maladie. D’autres approches moins invasives, ne nécessitant pas, notamment, la mise en aplasie, sont en cours d’étude, même si les anticorps dirigés contre ce récepteur ont pour le moment encore donné des résultats mitigés pour traiter cette affection.[...]
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Écrit par
- Hélène GILGENKRANTZ : directrice de recherche INSERM
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Média
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