PRÉHISTOIRE Alimentation
La transition alimentaire du Mésolithique au Néolithique en Europe
Fève (fruits)
Antonio Gravante/ Fotosearch LBRF/ Age Fotostock
Un moment clé de la préhistoire est le passage d'une économie de subsistance fondée sur la cueillette, la chasse et la pêche, qui représentaient le seul mode de vie de l'humanité depuis son origine, à une économie fondée sur la production des aliments, par l'agriculture et l'élevage. Cette révolution néolithique a modifié profondément les rapports de l'homme et de la nature. Comment s'est-elle traduite dans l'alimentation des populations européennes ? L'approche géochimique a été particulièrement fructueuse dans le cas de milieux frontières, comme le littoral marin, où deux chaînes alimentaires isotopiquement distinctes offrent des nourritures potentielles aux populations humaines. Au Portugal, en milieu côtier, des vestiges humains datant des deux périodes ont montré comment l'homme est passé, au Mésolithique, d'une alimentation essentiellement basée sur des ressources marines – qui se traduisent archéologiquement par des amas coquilliers impressionnants – à une alimentation strictement terrestre au Néolithique, et cela malgré une disponibilité aussi grande des ressources marines à cette période. Une situation comparable a été mise en évidence au Danemark, où les teneurs isotopiques des ossements humains montrent que les coquillages marins étaient consommés en abondance au Mésolithique, période d'accumulation d'amas coquilliers, tandis qu'au Néolithique les signatures isotopiques correspondent à une alimentation terrestre, d'agriculteurs-éleveurs. Ces deux exemples montrent comment l'alimentation des populations préhistoriques est dictée à la fois par les ressources disponibles dans l'environnement, et par un choix culturel effectué parmi ces ressources.
De plus, les analyses géochimiques devraient permettre de tester si des différences alimentaires sont visibles entre hommes et femmes à ces périodes, ce qui pourrait apporter des informations inédites sur les éventuels transferts d'individus entre populations différentes et refléter par exemple l'exogamie. En effet, un individu changeant de régime alimentaire à l'adolescence présentera dans ses dents, les signatures isotopiques de sa jeunesse, tandis que l'os enregistrera son régime alimentaire d'adulte. La comparaison des signatures isotopiques de ces deux tissus sur un squelette ancien devrait permettre de déceler de tels cas.
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Écrit par
- Hervé BOCHERENS : chargé de recherche au C.N.R.S.
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Média
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